I'll be back

Tappant du pied, elle s'apprêtait presque à repartir, lorsqu'elle vit s'approcher d'elle une silhouette rendue grise et aux contours indistincts par la pluie qui tombait si drue. Tirant derrière elle sa monture, qui s'appelait Annonyme, double clin d'oeil, l'un à son amant, l'autre... à elle même, autant qu'à un Marquis sybarite de sa connaissance, elle s'approcha un peu plus. Imperceptiblement, sous le capuchon qui protégait son visage, elle haussa un sourcil, s'étonna qu'on lui énumère des titres.

Ann de Plantagenêt, veuve de Carpadant, Princesse de Montmorency, Comtesse de Monbazillac, Vicomtesse de Bellac et de Montboissier, énonca t'elle en suivant la Duchesse Akane à l'intérieur du poste de garde.
Il y faisait plus chaud, et au moins, on était à l'abri de la pluie conglante. Elle avait bien du abandonner son cheval dehors mais qu'importe.

J'ai reçu une missive du capitaine Deny, m'annonçant que... *un temps de silence, les mots restaient bloqués dans sa gorge avec une certaine rancune à l'égard des membres de cet ordre. Déglutissant lentement, elle continua*...m'annonçant que j'étais admise au sein de la Licorne en tant que femme d'armes.

Ecartant les pans de sa cape, elle fouilla un instant parmi les replis doux et chauds de la doublure de fourrure, trouvant finalement dans l'une des multiples poches dont il était truffé, la dite missive, qu'elle avait bien failli déchirer en milles morceaux, reconnaissons le. Et avec un semblant de sourire, elle tendit la dite-missive à Akane.

C'est le moment que choisit le René pour revenir de son petit périple personnel: aller chercher le ravitaillement pour l'ordre.

Partis à l'aube au matin, à l'heure où blanchit la campagne, tu vois il partirait, car il sait que tu l'attends...*SCHBARF!* (Avec toutes nos excuses pour l'interruption et le départ en vrille, la narration reprendra son cours après un communiqué des intermittents du spectacle:)

Citation :

" Nous, intermittents du spectacle, après avoir débattu pendant plusieurs semaines en assemblées générales, avons décidé de l'état de fait suivant:

NOUS NE SOMMES PAS CONTENTS!

Merci d'avance de nous avoir écoutés."

(Ceci était un message à caractère informatif de la SPISDICOUNASSE: Société Protectrice des Intermittents du Spectacle Dispatchés à l'Intérieur des Cars d'Organisation Unilatéraux du Nouvel An Sikh et Samovar Eternel, merci.)

Hem...Où en étais-je donc? Ah oui! Ce brave René, parti à l'aube, à l'heure où la campagne blanchit...*Nananan, pas la baffe, pas la baffeuh!*.
Il avait quitté Ryes le matin, adoncque, accompagné d'une petite dizaine d'hommes d'armes: certains dirigeant les 4 chariots de ce bien singulier convoi, et les autres leur servant d'escorte, tout simplement. On peut penser qu'il pût être présomptueux de sortir avec si peu d'escorte d'une forteresse royale, alors que les routes normandes n'étaient pas sûres, mais c'était compter sans la réputation de l'ordre: car leurs exploits des dernières guerres contre les Bretons étaient parvenus aux oreilles de la gente brigandine, qui avait peu envie, surtout à ce moment de l'automne, de se frotter à la légende. Bref, les lourds charrois de bois s'étaient ébranlés, pour dans la matinée arriver à Arromanches, où ils achèteraient poissons, coquillages et crustacés sur la plage abandonnée (ohé, ohé). Arromanches était un petit bourg de pêcheurs, mais l'ordre avait commencé à contribuer à l'épanouissement du bourg, et l'on sentait une opulence toute relative certes, mais plus prononcée que dans les villages environnants, ce dont ses habitants s'enorgueillissaient volontiers. Les chevaliers achetaient, certes, et ils achetaient bien. Kékidi avait commencé à être connu dans le port, passant pour quelqu'un d'exigeant, de droit mais de juste. Il n'y avait évidemment pas que des amis, mais la plupart appréciaient bien les poches garnies qu'il arborait alors pour refaire les stocks de la forteresse. Après quelques emplettes au port, et avoir récupéré quelques produits alentours (lait, blé, maïs, quelques légumes), et avoir déjeuné dans la principale auberge du bourg, les charrois s'ébranlèrent à nouveau, direction Bayeux. Les routes du littoral normand n'avaient rien de particulierement vicieux, si bien que hormis quelques ornières et nids de poule, rien ne vint interrompre ou changer la monotonie du voyage jusqu'à Bayeux.

La ville, assez aisée, et munie d'une fort belle cathédrale, d'une belle tapisserie datant de plusieurs siècles, fut atteinte en milieu d'après-midi. Le soleil était à mi-descente, et commençait déjà à prendre sur certains aspects les teintes orangées qui le feraient atteindre une couleur rouge sang, juste avant son coucher. De nombreux nuages étaient dans le ciel, d'une fort méchante couleur noirâtre qui n'augurait rien de bon pour la soirée. Revêtue de cet habillage grisatre, la ville n'en bruissait pas moins de dizaines de bruits: vendeurs à la criée, mendiants, annonceurs de nouvelles, untel rapportant les dernières escapades nocturnes de quelque nobliau du coin, untel vantant les épousailles de telle pochtronne et tel pochtron du village, et autres cris de bestiaux et bestioles que l'on vendait. Kékidi acheta à proximité des halles du sel, du miel, de la viande, des oeufs, ainsi que nombre de poulets, de la bière normande, du cuir, de la laine, et de la toile, ainsi que nombre d'autres articles dont le détail en serait assurément superflu. Et bien que les hommes prétextassent l'envie d'aller un peu dans un bordel-taverne des environs, le René fut absolument intraitable: car Ryes devait être rejointe avant la nuit, sous peine de se voir trouver pont-levis relevé, herse abaissée, et ce bon Stannis parti dormir. Ainsi, c'est de fort méchante humeur que le groupe reprit la route, oriflammes et gonfalons aux armes de la Licorne mythique claquant aux quatre vents, mauvaise humeur s'effaçant vite sur la route, grace à quelques piques aigre-douce du géant d'ébène et à son rire communicatif. L'homme commençait paisiblement à se voir accepté et reconnu par l'ensemble de l'ordre, et était-il encore besoin de dire qu'il en était fort aise? Ainsi commençait-il même à se demander s'il n'irait point, l'un de ces jours, passer à Rouen ou à Dieppe, pour informer certains de ses compagnons d'infortune de la chance qui s'offrait à eux s'ils désiraient venir travailler à Ryes. Peut être que Domnonée, le palefrenier, pourrait aimer venir s'occuper de chevaux au haras, après tout, une fois celui-ci fini? Peut-être Albert, le bibliothécaire, l'ancien franciscain, aimerait-il cette bibliothèque pour y cultiver une culture générale qui, dans son souvenir, était fort étendue déjà?

Et ce fut au terme de cette longue route qu'ils atteignirent Ryes à la nuit tombante, alors que les nuages commençaient à déverser leur lourd contenu sur la terre. Et le René, précédé de la longue file des chevaux le précédant, de s'arrêter à la porte, ouverte ce soir là sur une fort jolie femme. Les cheveux noirs, les yeux bruns, et de fort belle tournure, elle était drapée d'un mantel de couleur sombre chaud et douillet, qui devait sûrement indiquer quelque nature noble. Le René, s'arrêtant au niveau de la porte, alors qu'Akane était sortie, apostropha alors l'écuyer responsable des lieux:

- "Hey, Stannis? Ca va? Bonne journée?"

Et, après avoir entendu sa réponse, le Kékidi de lui montrer une bouteille de goutte (=eau de vie, pour les berniques).

- "Tu la veux? 'Parait qu'elle réveillerait les morts, d'après l'taulier qui m'l'a r'vendue! Ca vous permettrait d'vous réchauffer, toi et ta duchesse d'arme! Héhéhé..."

Et le Kékidi, content de son petit sous-entendu, de se tourner vers la richarde qui demandait l'entrant:

- "Baaah mazette! Mam'zelle, que v'nez vous chercher en ces lieux si éloignés d'Paris?"

Le René, attendant une réponse, tâche alors de ne pas trop montrer qu'il est absolument ébahi de la grande classe de la jeune femme.

Tranquillement installé dans le fauteuil récemment introduit dans le poste de garde, tandis qu'Akane fait le pied-de-grue dehors, regardant cette monoto... Cette superbe (et humide) campagne dont la simple vue suffisait à se rafraîchir les idées. Alors que lui se sacrifiait pour rester bien au chaud, assis dans un siège trop mou, à se harasser l'esprit en tentant de comprendre les illustrations brouillonnes de ce fichu manuel d'escrime rédigé par un Germanique, qui croyait connaître le Français semblait-il, ce qui n'en rendait l'oeuvre que plus incompréhensible. Alors qu'il parvenait à faire sens d'un mot, difficilement, il entendit - difficile de faire autrement - la voix du tavernier qui s'élevait de l'extérieur... Ah oui, il était parti pour chercher le ravitaillement, c'est vrai...

"Hey, Stannis? Ca va? Bonne journée?"

Se retournant pour aller répondre (car n'étant pas doté des mêmes cordes vocales en fer forgé, il n'avait aucune chance de se faire entendre - et, vu le destinataire, encore moins - de là. Se retournant, il nota qu'une femme détrempée attendait devant le poste de garde, dont la vue lui était familière, mais au visage de laquelle il ne parvenait pas à associer de nom.

Bien le bonjour, dame... Il me semble que nous devons nous connaître, mais je ne parviens pas à retrouver votre nom.

Puis, s'étant glissé à l'extérieur après cette remarque, laissant tout juste le temps à la dame de répondre, il hurla à leur tavernier:

Ca va bien, merci! Et toi? Pas de soucis sur la route?

Il en doutait... Si jamais un souci s'approchait de leur convoi, il se rendrait rapidement compte en voyant le colosse qu'il avait oublié sa catapulte chez lui, et que par conséquent il n'était pas assez équipé pour penser s'attaquer à ces Licorneux.

Réveiller les morts? J'ai l'air si peu en forme? répondit-il à sa phrase suivante, riant de la fin de la réplique de celui-ci, avant de le voir se tourner vers la femme nouvellement arrivée, les yeux écarquillés... C'est vrai qu'elle était plutôt jolie, en fait, il ne l'avait pas bien vue sous l'éclairage faiblard de la pièce, mais s'en rendait maintenant compte.

Un brave gars, ce Stan'. Pas mauvais bougre, pas chiard, bref, le genre de type avec qui l'on peut discuter sans problèmes de tout et de rien, des heures durant. Après réflexion, le René se disait que l'avoir collé aux entrées était sûrement l'une des plus riches idées jamais trouvées, compte tenu de sa bonhommie et de sa gentillesse. Le René, avisant qu'il paraissait prêt à la réception, se retourna alors et lâcha la bouteille dans les airs, voltigeant gaiement jusqu'aux bras de l'écuyer. La réceptionnant comme un pilier de soule aurait reçu un ballon violemment expédié au ventre par un coup de pied, le René lui lâcha alors:

- "Boarf. Impec'. Beau temps, ciel bleu, comme on peut l'constater..."Il part là-dessus d'un grand rire, compte tenu de la foutue saucée qu'ils se prenaient sur le museau depuis plus d'une heure. - "L'Bande de Normandie fait bien son boulot. Pas de brigands à signaler. Par contre, la route...quelle merdasse! 'Faudra qu'on la fasse refaire un jour, celle qui va jusqu'Arromanches, pasqueuh qu'c'est réellement la galère pour y aller..."

...

- "J'parlais pas d'toi, p'tit gars. Mais d'tes morpions...Ca somnole, là-d'dans!"

Et le père Kékidi de rugir à nouveau d'un rire quasiment phoquesque (otariesque/Dominicfarrougiesque?), content de la petite pique. C'était bien son style, oui. Titiller les hommes, pour les encourager à ne pas s'incliner. Et pour ne pas s'incliner, il avait trouvé son lieu: de mémoire, il n'avait encore jamais vu d'endroit où les gens avaient une aussi grande gueule, 'fallait l'avouer. Se retournant vers la jolie brune, il l'observa attentivement alors qu'elle lui répondait. Incliné légèrement sur le côté droit, là où elle se trouvait, un grand sourire montrant ses chicots un peu paillave, fallait l'avouer, l'air du playboy disant "Salut, belle enfant. Tu vis encore chez tes parents?"

(Pour le rire de Kékidi, imaginer Dominique Farrugia regardant la vidéo suivante)

( HRP: Comme Stannis l'a superbement noté (mékiléfortçuici...^^), le Kékidi parle toujours fort, malgré le fait que c'est pas mis en énorme. Considérer qu'il est à la limite de crier, marki. )

Akane avait enfin des nouvelles du Grand Maître. La Princesse attendait bien patiemment. Elle remarqua que Stannis la reluqua et entendit les allusions de Kékidi

Les bougres... Ils y vont pas avec le dos de la cuillère... pfff... jamais ils m'ont fait ça à moi ! C'est vrai qu'elle est bien jolie mais quand même ! dit elle en marmonant tout bas

Elle s'approcha de la Princesse

Madame du nouveau vous concernant ! Lui dit elle tout sourire

- Fichtre ! Pour qui se prend elle celle ci ! Elle gromella... Princesse ou pas, elle devrait être plus aimable !

Elle réalisa soudain plus précisement qui était Ann... De nombreux souvenirs lui revinrent en tête, et elle manqua de défaillir, se retenant à un mur...