Le retour de deux errants

Ryes… Février 1457
La nature environnante reprend ses droits et renait peu à peu, après un hiver des plus rudes que la région eu connu. Les sentiers menants à Ryes sont bourbeux.
Pourtant, une chariotte avance tant bien que mal, s’enfonçant parfois, avec à son bord un homme et une femme encapuchonnés.
Ils s’arrêtent un instant et observent en silence la forteresse qui se dessine devant eux.
Combien de temps étaient ils partis ? Deux mois peut être plus….
Le devoir les avait éloignés de ce lieu, de leurs proches. Un échange de regards entre eux, et quelques acquiescements forcés, ils reprirent leur ascension tant bien que mal, arrivant avec peine devant l’entrée.

- Nous y sommes Ethan, enfin nous y sommes. Nous aurions peut être été plus rapides sur de simples montures. Peux-tu m’aider à descendre ? N’y émet pas d’objections s’il te plait. Le voyage m’a engourdi les jambes.

Ton franc direct sans détour ponctué d’une remarque cinglante. La femme d’allure noble, est enceinte jusque aux yeux, difficile pour elle de se mouvoir comme auparavant. L’accouchement serait proéminent. Grande inspiration sonore. Prise de conscience soudaine. Elle avait parlé trop sèchement à son camarade -Foutues hormones- pensa t'elle... Un camarade qu'elle avait appris à connaître, camarade qui lui ressemblait sur bien des aspects, et qu'elle appréciait. Rares étaient les personnes qui avaient ce privilège ces derniers temps.

- Excuses moi, je n’aurai pas dû…

Elle tente de se lever et s’appuie sur un des rebords de la chariotte. L’équilibre est incertain, la capeline rouge sombre et la robe de même couleur n’aide pas, le poids de son ventre la fait vaciller. Elle peste. Elle n’avait pas changé et n'en changerait pas. Sa nouvelle tâche l’attendait, son mari… Le temps aurait il fait son œuvre ?
Des douleurs…
De grosses douleurs…
Il était temps qu’elle prenne du repos et qu’elle arrête d’arpenter les routes du royaume. Les affaires normandes qui l’attendaient furent réglées rapidement. Elle pouvait se consacrer au calme à ses nouvelles attributions au sein de l'ordre.
Léger malaise, elle se rassoit.

- Ethan… Rentrons au plus vite… Fais demander Nith je te prie.

Langueur monotone d’un hiver Artésien qui vient blesser la dignité des escorteurs de sa Majesté le Roy. Refoulés tels des mécréants aux portes de ce comté devenu autonomiste par la folie décadente de son régnant. S’étant vu refusé son allégeance au Roy par excommunication de l’EA, YeuxBleus en avait piqué une colère qu’il avait réussi à influer aux plus extrémistes de ses concitoyens.

A peine arrivés à Berthincourt, les Licorneux et autres suivants s’étaient vus apostrophés et menacés des pires sévices s’ils ne s’en retournaient pas immédiatement d’où ils venaient. Tout y était passé, les insultes, la calomnie, les bassesses … Seules la Princesse et Zalina avaient tenté de résonner les accusateurs en place publique.

De son côté, Ethan avait subit l’intolérance et le mépris en taverne. On l’avait attaqué verbalement, on l’avait invectivé sous toutes ses formes … Il avait dû se fustiger intérieurement pour ne pas répondre et tenter de raisonner ceux qu’il aurait pu passer par le fil de son épée sans leur laisser aucune opportunité d’en réchapper. Sa dignité en fut atteinte, quand bien même il n’en laissa rien paraître.
Son honneur fut bafoué quand on leur ordonna de dissoudre les lances et de repartir immédiatement sous peine de procès. Chacun reprit le chemin de Dieppe comme il le put, contrit, blessé, n’ayant pas compris le fond réel de cette acharnement.

Il leur fallut deux jours pour tenter de se réorganiser et de reconstituer ce qui avait été détruit en une seule nuit. Deux longs jours à retrouver tous les membres des Ordres Royaux ou non, pour reformer les lances dans l’attente d’un prochain départ … Deux jours interminables au cours desquels il fut donné à Ethan de prendre conscience de l’état de sa sœur Akane. Elle était enceinte jusqu’au cou, et c’était peu dire tant son ventre semblait distendu et prêt à délivrer la vie qu’il semblait vouloir retenir encore quelques temps.

Quelques mots échangés entre eux, et la solution la plus raisonnable qui leur vint fut de la conduire urgemment en Ryes où elle serait bien mieux entourée pour y recevoir l’aide nécessaire à un tel événement. En effet, nulle connaissance à Dieppe ne leur permettait de concevoir de la laisser y accoucher. Et Ethan ne se voyait certes pas à l’y aider, lui qui savait seulement se recoudre si nécessaire.
Il fallait cependant organiser le voyage, et dans son état, elle lui semblait bien incapable de chevaucher sur une telle distance. Il n’aurait plus manqué qu’elle le fasse en route le p’tit …
Fort de son statut de Licorneux, il parvint à négocier le prêt d’une petite charrette qui suffirait au transport d’Akane. Des vivres pour quelques jours, des couvertures et des peaux pour qu’elle demeure bien au chaud, et le petit équipage avait entrepris la traversée de la Normandie pour rejoindre leur destination.

Quelle étrange sensation que de se retrouver ainsi au pied de ce monticule surplombé de sa forteresse inexpugnable. Comme à chaque fois qu’il y revient, Ethan ressent la même émotion qui l’avait tenaillé au premier jour. Celle de n’être que peu de chose face à la puissance générée par ces pierres qui avaient contemplé bien des arrivants. Le sommet est enfin atteint malgré la difficulté engendrée par l’état du chemin boueux.

Ton cinglant de sa sœur venant lui rappeler les sautes d’humeurs d’une femme enceinte, et lui ordonnant de l’aider à descendre. Sans mot dire, Ethan préfère sauter de l’équipage et venir la rejoindre au moment même où elle s’excuse, en tentant vainement de se débrouiller seule … Un léger sourire vient s’afficher sur les lèvres du Licorneux, rassurant sa sœur sur sa compréhension de son état. Il passe une main sous ses jambes et l’autre dans son dos, prenant toutes les précautions nécessaires pour la soulever sans la blesser. Heureusement malgré son état, son poids est encore raisonnable pour qu’Ethan ne plie pas sous la charge. Sans pour autant la poser à terre, il rejoint avec précaution la première herse du poste de garde et interpelle ses surveillants :
Holà frères de la Garde, c’est moi Ethan … Portez moi une chaise et faites mander le chevalier Nith urgemment !

Invité

Gamling veillait, encore et toujours. Il se tenait derrière les massives herses et attendait. Il attendait un nouveau visiteur, un peu d'action. En résumé il attendait quelque chose d'autre à faire que de rester planter là, derrière les grilles.

Outre un peu d'action, il attendait aussi le retour des beaux jours. Si les jours se faisaient légèrement plus chaud, Gamling frissonnait toujours autant dans le nord du Royaume, en Normandie. Le froid se faisait d'autant plus sentir qu'en restant immobile il ne se réchauffait guère. C'est dans ces moments là que tous les comtés et duchés où il avait vécu, et ou il vit toujours lui manquait.

Sa distraction, sa seule, demeurait l'évasion de part ses pensées. Il pensait à autre chose en permanence. Au moins il était seul, personne pour l'ennuyer et son désire de solitude, était satisfait.

Enfin son regard capta une nouvelle arrivée. Un chariot venait dans sa direction. A son bord il put distinguer deux personnes encapuchonnées. Que venait-il faire ici ? Cela semblait étrange. Mais lorsqu'ils furent suffisamment près Gamling comprit. Il reconnu en premier Arkane, de part le fait qu'elle soit enceinte. Puis il reconnu ensuite le visage de Ethan. Tout allait bien. On voyait clairement qu'ils avaient essuyer un long voyage, sans doutes plus long et moins confortable pour celle qui était enceinte. Il se rapprocha d'avantage et salua les deux personnes de la tête.

Sans un mot l'Armagnacais exécuta les ordres d'Ethan. Les ordres de lever la herse furent donnés tandis qu'il se précipitait vers le poste de garde dans le but de trouver une chaise. Il en profitant également pour prévénir Mackx, qu'il puisse surveiller l'entrée le temps qu'il trouve le Chevalier Nith.

Mackx, j'ai fais lever la herse, Ethan et Arkane sont à l'entrée. Je vais quérir le Chevalier Nith. Tu peux surveiller l'entrée ? Je ne serai pas long.

Il revint peut après pour tendre à Ethan la chaise demandée.

Je vais informer le chevalier Nith de vôtre arrivée

Sur ces mots, il tourna les talons et pressa le pas. Il devrait trouver le chevalier Nith. Mais si celui-ci se trouvait dans une salle dont il n'avait pas les clefs cela risquerait de prendre plus de temps.

Nouveau jour ... nouveau matin ... nouvelle garde ... mais pas de nouvel homme d'armes pour aider les deux braves pelés qui gardaient le poste de garde (ben oui, on ne garde pas un poste de radio par exemple). Tant pis, on fera sans et puis de toute façon, depuis qu'ils géraient à deux, ils n'avaient eu aucun problème à déplorer alors ...

Un petit coup d'oeil rapide et fréquent sur Gamling qu'il devait couvrir - dans le jargon, on l'appelait Mackx l'édredon pour sa maitrise de la couverture - et entre les coups, le Vicomte continuait, inlassablement, à lire son traité sur les fléaux d'armes.

Et puis, ce qui devait arriver - car tout est écrit ... ou pas - arriva. Le coup d'oeil vit que l'homme d'armes avait bougé et donc qu'il y avait du nouveau dans la baraque. Et ça, ça voulait dire qu'il fallait déposer son traité et regarder attentivement ce qui se passait.

Quelques dizaines de secondes d'adrénaline - on ne sait jamais et puis, contrairement à Gam', Mackx ne voyait absolument pas ce qui se trouvait sur la route - qui retombent aux paroles de l'Armagnaçais. Ok, tout va bien, ce ne sont qu'Ethan et Akane.

Aucun problème Gamling ! Prends ton temps pour trouver Nith, je veille sur la porte.

Ah, une belle journée d’été, se prélasser sur la plage, avec les chauds rayons du soleil pour couverture, le flux et le reflux de la mer pour berceuse, et les doux vents marins pour rafraichir un peu l’atmosphère. Il se tenait seul sur la plage, assis sur le sable, égrainant petit à petit les minuscules cristaux de quartz et autre minéraux constituant l’agréable tapis où reposait son séant. Il profite de la vie, il profite de la chance qui lui était donné de pouvoir bénéficier de ce don, respirer à plein poumon sans subir les assauts de la toux, de déborder d’énergie à ne plus savoir quoi en faire, profiter d’un corps qui répond à ses moindres désirs, sans limitations, sans restrictions ou presque. Ah, quel agréable sensation de sentir la douce caresse de la brise contre sa peau préalablement réchauffée voire dorée par l’astre diurne. Qu’il est reposant d’écouter tranquillement le chant de la mer, immuable, puissant et profond, sans accrocs ni fausses notes. Qu’il est envoutant de voir à perte de vue cette étendue d’eau toujours en mouvement, respectée pour sa force, crainte pour son côté imprévisible et sans pitié pour les faibles. Il pourrait y passer des heures, rester assis à penser à tout et à rien, sans soucis, sans tracas, juste l’envie et le besoin d’assouvir cette impulsion, ce désir d’évasion, de liberté.

Toc toc toc.

Les bruits se font plus forts, plus insistants, mais aussi plus dissonants avec les restes futiles de sa vision. Ses yeux s’ouvrent, ses paupières battent furieusement l’air avant de pouvoir enfin retrouver une vue correcte. Mince, ce n’était qu’un rêve, un doux et agréable rêve, une utopie bien lointaine à la dure réalité qu’il vivait. Il se trouvait dans sa chambre, assis à son bureau, une pile de dossiers un peu éparpillés juste en face de lui. Arf, il avait encore dû s’endormir, d’ailleurs, la main passée sur sa joue lui indiquait qu’il avait assurément quelques traces visibles, quelques preuves de sa sieste… Un tour sur lui-même lui permet de reprendre possession et de son corps endolori, et de son environnement. Un vent frais soufflait dans la pièce. Par la fenêtre, un carré de ciel gris, morne et terne se découpait contre le mur, vraiment pas engageant… Le feu dans la cheminée brûlait ses dernières heures de vie, le manque de combustible avait rendu les flammes minuscules, même pas de quoi réchauffer cette petite pièce lui servant de chambre.

Toc toc toc.

Ah, il n’avait donc pas rêvé, il y avait bien quelqu’un qui frappait contre sa porte ! Petite toux afin de se dégager la gorge et de rendre sa voix un peu plus audible et un peu moins rauque, il prit la parole :

Oui, vous pouvez entrer.

Il s’agissait de l’Homme d’Armes Gamling lui faisait part du retour des Errants Akane et Ethan. Bizarre, pourquoi leur retour nécessitait sa présence ? Après tout, ils étaient membres de la Licorne, ils pouvaient donc passer sans encombre le poste de garde… Ils étaient assez grands pour se débrouiller, non ? Ce n’est pas la procédure normale, à la limite il aurait compris s’ils avaient demandé le Prévôt, mais lui, il n’avait pas vraiment d’attribution concernant ni le poste de garde, ni la sécurité de la forteresse. Ou alors… Ou alors c’était parce que quelque chose de grave était arrivé ! Non, ce n’était pas possible ! Akane ? Pourtant, il était contre le fait qu’elle fasse partie de l’Escorte Royale dans son état ! Non, ce n’était pas possible ! Branle-bas de combat chez le Perplexe : d’un mouvemente fluide, il se vêt de son mantel, se lève et prend la porte. D’un signe de tête, il remercie Gamling, tout en lui affirmant qu’il pouvait retourner à son poste. Après tout, mieux valait qu’il ne l’attende pas, il ne pouvait aller à un train d’enfer et serait sûrement arrivé bien avant que le Perplexe n’arrive à descendre les escaliers de la Tour Achille, à moins bien sûr qu’il ne tombe et dévale les marches en boule…

Muni de sa canne, il déambula le plus rapidement possible, mais autant demander à un canard de marcher sur trois pattes… Le temps semble encore se ralentir alors que visiblement sa présence étant demandée d’urgence. Les pierres semblaient défilaient de plus en plus lentement, ses pas de plus en plus petit… Et bien, il n’était pas encore prêt à courir aux premiers rangs sur le champ de bataille afin d’attirer les traits des archers ennemis… Mais enfin, le poste de garde en vue, la herse relevée, les gardes de faction autour de deux personnes. Le souffle court, il se précipita vers l’attroupement :

Mon Dieu, que se passe-t-il ? Des blessés ? Ce n’est pas moi qu’il fallait appeler en premier, mais Cerridween ou Zalina !

Oui, le Perplexe est souvent, si ce n’est toujours à la masse. Il comprend vite, mais il faut lui expliquer longtemps, alors quand on le fait mander d’urgence et qu’il a malheureusement le temps de réfléchir à la situation, il ne peut s’empêcher de s’imaginer le pire…

Les secondes s’égrainent lentement, semblant presque interminables au porteur du fardeau des deux vies encore réunies au sein du seul corps féminin qu’il maintient avec précaution au creux de ses bras. L’ordre de lever la herse est enfin donné, et le lourd ouvrage s’élève graduellement dans un bruit de métal martyrisé. Sons étranges et stridents, faits de grincements et de complaintes métalliques, déclenchant un sentiment de robustesse immuable encore plus sécuritaire, si besoin en était, quant à la puissance dégagée par la citadelle apportant protection et réconfort à ses résidents. A nouveau ce trouble persistant qui vient l’assaillir, lui provoquant un frisson le parcourant de l’atlas au sacrum, comme semblant vouloir se faire l’écho de la résonnance provoquée par la montée de l’assemblage d’acier.

Gamling s’active sans tarder, leur portant une chaise sur laquelle Akane est déposée avec prudence. Les consignes sont données avec une efficacité pertinente, synthétiques, brèves, n’autorisant ni questionnement, ni objection. Ethan se dirige de nouveau vers la charrette où il récupère une couverture faite de peaux de loups assemblées dont il s’empresse de venir couvrir Akane. Elle n’a nul autre choix que de se laisser faire l’errante. Ethan demeure obstinément muet comme à son habitude, mais son regard parle pour lui. Ses yeux d’un sombre profond sachant exprimer bien mieux que les paroles futiles, ce qu’il se refuse si souvent à formuler.

Le Chevalier diplomate, membre du Haut Conseil de l’Ordre, répondant au patronyme de Nith aussi surnommé le Perplexe, détenteur de nombreux titres de noblesse dont Ethan ne s’est jamais donné la peine de tenter de se les remémorer, et géniteur de la vie fœtale siégeant pour quelques temps encore en le sein de son errante d’épouse, parvient enfin à les rejoindre. Essoufflé et claudiquant plus qu’il ne marche, aidé de sa canne qui lui sert d’appui, il parvient cependant à trouver la force de les interroger sur l’urgence de l’avoir fait mander.

Ethan relève un sourcil marquant son étonnement. Bien sur que non il n’y a aucun blessé ! Et que vient faire le bon Dieu là dedans, ce n’est pas lui qui a fécondé Akane ? Sait-il au moins qu’elle est enceinte son épouse ou bien sa faiblesse est telle qu’il en a perdu la mémoire ? Par contre il n’a pas vraiment tort sur le fait que Cerrid ou Zaza devraient ausculter la future maman, parce qu’elle avait eu beau le rassurer sur le fait qu’elle n’était pas à terme, il n’y connaissait fichtre rien le blondinet. D’après lui quand on a un ventre de cette taille c’est que quelque chose doit en sortir d’une façon ou d’une autre, ou bien que l’on a plus qu’abusé de la bière et de la bonne chair. Lui, il avait voulu s’assurer que le « paquet » soit livré en sécurité afin d’être pris en charge par les personnes les plus compétentes qu’il connaissait en la matière. Maintenant, il n’était ni médicastre, ni sage-femme, ni qui que ce soit d’autre ayant des connaissances médicales, et qui plus est il n’était pas non plus le père de la progéniture qui semblait ne plus vouloir tarder à montrer le bout de son nez. Il allait falloir remettre les choses et chacun à sa place pour qu’on ne reste pas plantés là à attendre l’arrivée du printemps.

On n’était pas là pour se faire des « areu-areu » ou des « gouzis-gouzis » … enfin tout au moins pas dans l’immédiat … ça, ce serait pour le prochain round. Il fallait tenter de lui ramener les pieds sur terre au Chevalier, et de l’enjoindre à reprendre le flambeau qu’Ethan avait porté jusque là. Il ne fallait cependant pas non plus le brusquer, pas envie qu’il se casse une de ses trois pattes … Pis en plus, les retrouvailles ce n’est pas son truc au blondinet, donc plus vite on l’oublie et mieux il s’en ressent. Trouver les mots justes, éviter les embrassades, les effusions de larmes et s’en retourner au plus vite d’où il vient avec l’espoir secret de croiser quelque brigand de grands chemins, histoire d’exorciser la tension sournoise accumulée pendant tout ce voyage.
Bonjour heureux futur papa. Je crois qu’il t’appartient désormais de prendre en charge ta Dame et son contenu.
Pour ma part je me dois de rejoindre l’escorte royale au plus vite.

Visiblement, Ethan la rassura avec un sourire : Il n’avait point tenu compte de ses remarques.
Tant mieux.
Elle n’eut pas eu le temps de souffler que celui-ci la porta dans ses bras, et pourtant, elle était lourde, très lourde. Pas le courage de se débattre. Elle n’apprécie pas être portée. Trop instable. Gamling apporte enfin une chaise sur laquelle on l’installe avec grandes précautions. Ethan la recouvre de peaux de loups pour la réchauffer… Ethan… A tout jamais elle lui serait reconnaissante de lui avoir fait entendre raison et d’avoir pris soin d’elle lors de ce voyage.
Elle lui sourit…Avec une certaine crispation, mais elle lui sourit, alors que dans ses tripes se déroule un match de soule. Impossible de discerner si l’enfant à venir avait grande énergie pour s’agiter de la sorte ou bien si il avait un petit camarade de jeu. Ca se tord, ça se durcit, ça fait mal par moment. Bon sang, lui faisait il payer son imprudence ?
Certainement…
Au loin, un bruit de canne. L’errante relève ses yeux et aperçoit son époux qui se précipite vers elle. Il semble paniqué…
Des blessés… Avaient-ils l’air blessés ? Elle grommelle légèrement presque inaudiblement
Avait-il le souvenir qu’elle portait sa descendance ? Ces choses là ne s’oublient pas !
Léger hochement de la tête. Elle allait lui répondre mais son frère d’armes la devança. Les mots étaient dits que rajouter de plus ?
Le fait qu’il reparte sur les routes ne la rassura pas. Ces derniers temps furent durs pour l’escorte royale… Refoulée… victime des railleries des artésiens… Chacun en avait pris pour son grade, rongeant son frein.
Mais Ethan…
Ethan était comme elle, fougueux et impulsif. Si par malheur il venait à croiser la route d’un mécréant, qui sait ce qu’il pourrait se passer ? Qui sait s’il n’évacuerait sa colère sur celui-ci ?
Inquiétude qu’elle manifeste par un regard rapide avant de le reporter sur Nith.
Inquiétude quand à la poursuite de sa grossesse et son aboutissement
Inquiétude quand à son mariage.
Tant de choses la tourmentaient. Se plonger dans le travail qui l’attendait lui ferait le plus grand bien. Elle ferme les yeux un instant… Instant de répit, instant de calme. – Tu ne failliras pas, jamais. Toujours, tu assureras les tâches et les devoirs qui t’incombent avant tout autre chose. - Prunelles azur qui s’entrouvrent devant le rassemblement se tenant devant elle. Prunelles à la teinte froide, dénuées d’émotions. Il fallait faire pour le moment réagir ce petit monde devant elle quasi immobile ou paniqué pour certains. Les retrouvailles seront pour plus tard, même si elle attendait cela depuis fort longtemps. Son regard se porte sur Ethan, lourd de sens.

- Ethan, tu devrais te reposer avant de repartir, sois prudent sur les routes.

Puis tournant sa tête vers Gamling

- Pourrais- tu faire mander un médicastre ? J’ai reçu un pli de Cerridween dernièrement m’annonçant que Flaiche d’Alterac faisait parti de l’équipe de soins de Ryes. Fais le venir, je te prie.

Les consignes étaient données. Elle fit signe à Nith de se rapprocher d’elle.

Invité

L'homme d'arme avait été chanceux, ou plutôt l'errante. Le premier lieux où Gamling posa pied il trouva le Chevalier, dans son bureau. Ainsi Gamling n'aurait pas à courir de salles en salles dans la forteresse et l'attente de l'errante en serait réduite. Le garde reçu l'autorisation de pénétrer dans le bureau. Sa première réaction fut de sourire, intérieurement. Visiblement il venait de tirer le Chevalier de son sommeil. Dés qu'il en eut l'occasion, L'armagnacais prit la parole et prévint le Chevalier de la nouvelle arrivée.

Gamling prit les devant. Derrière lui résonnait les claquements d'une canne rencontrant les pavés des couloirs de la forteresse. L'homme d'armes adaptait son allure à celle du Chevalier de façon à ne pas arriver trop avant ce denier ; Que dirait-il s'il arrivait un bon moment avant lui ? Tout comme le Chevalier, Gamling ne comprenait pas grand chose à ce qui se déroulait en ce moment.

Il n'était surement pas du genre à se tenir au courant des derniers potins il ignorait même que le père de l'enfant n'était d'autre que Nith. Bien rare étaient les fois où il se tenait au courant à vrai dire. Si les nouvelles ne venaient pas à lui ce ne serait sans doutes pas lui qui irait les chercher. Cependant il avait une théorie, la plus plausible enfaite : La forteresse se préparait à accueillir un nouveau licorneux, on pouvait le voir ainsi.

Il revint auprès des deux errants et se tint sur le côté, sans un mot, sans rien faire si ce n'est se tenir droit comme un piquet et observer la scène se déroulant sous ses yeux qui jetaient des regards d'incompréhension. Le chevalier ne tarda pas à arriver peu après lui. Puis Akane se tourna vers l'homme d'armes. Un médicastre ? L'équipe de soins ? Sa théorie prenait alors tout son sens et semblait se confirmer. Le banalité des arrivées venait d'être ébranler, s'il s'attendait à une nouvelle journée sans surprises, l'Homme d'armes avait tort.

Bien.

Un simple mot accompagné d'un mouvement de la tête se valant rassurant. Les ordres, s'il l'on pouvait les considérer comme ordres, étaient clairs. Gamling s'employa à la tâche immédiatement prenant le chemin de la salle de soins, à la recherche de ce Flaiche, où à défaut de quelqu'un de compétent dans ce domaine.

Bonjour heureux papa. Ce n'est pas une réponse ça! Et puis d'abord, de quoi il parlait? D'après ce qu'il savait, et il en était à peu près sûr, il n'était point le père d'Ethan... Ou alors, il avait dû vider au moins une bonne douzaine de fûts de calva pour oublier depuis tout ce temps pareil événement! Mais il a dit futur... Mais, jusqu'à preuve du contraire, Ethan n'est point enceinte... Houlà, il faut vraiment qu'il se pose, là, il ne comprend plus rien à rien! Bon, il fallait reprendre tout depuis le début afin de ne perdre aucun détail et prendre pleine mesure de la situation. Bon tout d'abord les deux Errants dont sa femme. Bizarre, s'il y avait eu quelque chose d'important, elle aurait sûrement utilisé un coursier pour lui faire parvenir une missive... Enfin, il n'était plus vraiment au courant de ce qu'il se passait du côté de chez sa femme, juste qu'elle poursuivait encore la route de l'Escorte Royale. On ne pouvait pas dire que cela les aidait à se rapprocher, lui à son travail, elle à sa mission... Ethan était là lui aussi, visiblement tendu et pressé de partir. Le Perplexe se demandait bien ce qui pouvait se tramer dans la tête du jeune homme. Il pouvait le lui demander directement, voire même le lui ordonner si l'envie le lui dicter, mais d'une part il n'aimait pas jouer avec son autorité, deuxièmement il se doutait un peu de ce que pouvait ressentir l'Errant, vus les rapports qu'il avait dernièrement lus sur l'escorte, et enfin il préférait que cela vienne naturellement, une confidence n'a de véritable valeur que lorsqu'elle est spontanée et décidée par soi-même.

Il regarde à gauche, à droite: non pas de sang, pas de membres avec un angle bizarre, pas de coloration improbable, signe de quelque mal inconnu. Non, rien d'anormal, rien de particulier, mis à part le ventre bien arrondie de sa moitié. Et bien, il ne savait pas que l'on mangeait autant lors de l'escorte, mais après tout, il y avait bien tous les festins et autres buffets servis à chaque étape de la promenade royale... Mais quand même, à ce point... Et puis les mots de l'Errant lui revinrent en mémoire... "ta Dame et son contenu"... Depuis quand une personne était un conteneur? Bizarre bizarre comme formulation... Mais petit à petit, le lien se fit dans son esprit: c'était l'heure, c'était le moment où le fruit de leur amour si mouvementé allait éclore... Hum... C'était une situation assez étonnante... Il ne s'y attendait pas, enfin pas maintenant, pas dans ces conditions, l'éloignement du couple, sa propre santé vacillante, sa charge qui occupait une large partie de son temps. Non, on ne pouvait pas dire que c'était le bon moment... Mais les choses n'arrivent pratiquement jamais au moment propice, il fallait donc faire avec. Mais comment faire avec un enfant? Quelle est la conduite à tenir pour être père? Il voyait à peu près ce que cela pouvait donner au niveau de l'éducation, mais la relation enfant-parent ne se résumait pas uniquement au dressage... Il riait de la manière dont les personnes qu'ils connaissaient se conduisaient une fois devenus père, mais lui était totalement désemparé pour le moment...

Bon, il fallait prendre les choses une par une. D'abord, un médicastre, c'était le pion essentiel pour ce genre de situation. Car il n'y connaissait rien en ce qui concernait la médecine, de près comme de loin. Couper et brûler étaient les seuls gestes qu'il connaissait qui pouvaient s'apparenter à des gestes médicaux... La petite Tempête en appelle à Gamling et le charge d'aller quérir la personne disponible la plus compétente en la matière. C'était déjà un bon point. Il fallait penser à remercier l'Homme d'armes, il montrait bien qu'on pouvait lui faire totalement confiance et qu'il mettait toute sa détermination pour accomplir son devoir. Il fallait qu'il garde cette idée dans la tête...

Ensuite Ethan. Il parlait de retourner de suite à l'escorte, ce qui semblait un peu prématuré pour le Perplexe, d'autant que pour l'instant, elle était au point mort... Bizarre bizarre... Il n'est jamais bon de partir tendu, fatigué, embrouillé par ses sentiments. Et, d'après ce qu'il voyait, il pouvait dire que le jeune Errant était pour le moins tendu. Même si Akane venait de lui conseiller de rester se reposer, ce n'était qu'un conseil, qu'il pouvait tout à fait ignorer. Aussi, autant en rajouter une couche...

Ethan, rien ne presse, alors tu peux rester en la forteresse quérir quelque repos ou nourriture avant de reprendre la route. Il n'est point judicieux de reprendre la route fatigué, même si les routes de Normandie sont assez sûres, surtout autour de la forteresse, il y a toujours un risque de rencontre malvenue. Il vaut mieux être frais et disponible avant de prendre la route, et non de suivre le mauvais exemple de certain chevalier...

Au fur et à mesure de ses paroles, il se rendit compte qu'il ne respectait pas vraiment ce qu'il venait de dire lui-même, chevauchant au-delà de ses limites, continuant de travailler malgré ses maux, accomplissant son devoir malgré tout. "Fais ce que je dis mais ne fais pas ce que je fais", voilà à quoi cela lui faisait penser, et il n'en était pas vraiment fier... Mais il pourrait remédier à la situation plus tard, d'autres préoccupations plus importantes se profilaient devant lui. Il remarqua le signe de tête de son épouse et s'approcha, mais point trop près: il était encore souffrant, ce genre de mal ne se dissipant pas aussi rapidement que l'espoir ou le besoin le faisait sentir. Aussi, il ne souhaitait point contaminer et sa femme, et la petit être à venir par une trop grande proximité, bien que cela lui coûtait. Si proche, un besoin de contact, de proximité, d'intimité... Et pourtant cela lui était interdit par son sens du devoir envers sa famille, et son honneur... Pourtant, il restait droit et fier, la regardant dans les yeux:

Et bien, le bonjour ma chère. Il semblerait que tu m'apportes une surprise, non?

Flaiche baguenaudait dans la forteresse, un parchemin dans la main, notant toutes les herbes aux vertus diverses et variées qu'il pouvait rencontrer dans la forteresse. SI le jardin en comptait déjà quelques spécimens, certains plantes avaient pris possession de recoins plus ou ensoleillés, au gré des graines portées par le vent ou par les déplacements incessants des membres de l'ordre. Etant plusieurs fois tombé sur de petits coins de regorgeant de telle ou telle plante, certaines de se trouvant plus dans le jardin, il s'était décidé à tenter de les répertorier toutes.
Ainsi, puisque comme le lui avait suggéré le maistre d'arme, les jardins auraient besoin d'un petit réaménagement, un listing détaillé permettrait de savoir ce qu'ils auraient sous la main, et où trouver les plantes qui leur manquait.
Ayant finit son premier tour de la forteresse, Flaiche roula le parchemin et le rangea dans sa besace, se doutant qu'il n'avait pas encore trouvé chaque recoin d'où il pourrait tirer quelques plantes. De même, il comptait bien sortir de la forteresse pour quérir d'autres plantes aux alentours de celle ci.
Ryes serait peut être même une source de nouvelles découvertes. Les gens avaient parfois dans leur propre jardins des richesses insoupçonnées. Si le médicastre pouvait, avec leur accord, en prendre quelques plants afin d'en augmenter la diversité des jardins de la Licorne, cela serait un plus non négligeable.

Revenant à l'infirmerie pour faire cette fois le détail des décoctions et remèdes divers qui y était stockés, et surtout comparer cette liste avec celle qu'il venait de faire, pour voir ce qu'il conviendrait de récolter afin de palier aux manques de l'infirmerie, Flaiche trouva un mot à son encontre, déposé à priori par Gamling.

Citation :

Bonjour,

Vous êtes demander au poste de garde. Une arrivée de deux errants nécessite vos talents de soins. Probablement pour un futur enfant

S'il en croyais sa discussion avec le maistre d'arme, il devait s'agir la d'Akane.
Quelques médecines prises en vitesse, l'idée d'avoir à accoucher la responsable des hommes d'arme en plein milieu du poste de garde ne l'enchantant pas franchement, mais il n'aurait peut être pas le choix, Flaiche se rendit au lieu dit le plus rapidement possible, espérant que la situation ne soit pas déjà trop avancée.
L'inquiétude se lit sur le visage du médicastre. Trop peu de temps qu'il est revenu, trop peu de temps qu'il est à l'infirmerie. Il n'a pas eu le temps de prendre ses marqques, de savoir où le matériel se trouvait, ou était ranger tel ou tel ingrédient.... L'accouchement s'annonçait il difficile pour que le médecin soit appelé au lieu de faire monter la future mère à l'infirmerie ? Si tel était le cas, la situation s'annonçait très périlleuse pour la mère comme pour l'enfant.
Angoisse. Perdre un enfant....ou la mère......voir les deux. Pensées sombres qui s'insinuent. Il lui faudrait quitter l'Ordre si cela arrivait. Plus jamais il ne pourrait regarder ses frères en face s'il échouait dans sa tâche, cette tâche qu'on lui avait confiée, pour laquelle il devait se montrer digne de l'honneur et de la confiance qu'on lui faisait.

Suffit ! Il ne fallait pas laisser ces idioties prendre le dessus, le contrôle, et venir tout gâcher. Ce n'était pas son premier accouchement. Ce ne serait pas sa première situation difficile. Il ferait ce qui était en son pouvoir, tout ce qu'il pourrait. Il devait pour cela garder l'esprit clair, posé et calme. Presque froid. Se détacher de la situation, faire comme s'il ne connaissait personne, comme s'il se fichait éperdument des éventuelles complications...pour mieux les combattre, implacablement. Les dénicher, les comprendre, les vaincre. Sans état d'âme. Sa confiance retrouvée, il accéléra encore le pas.

Saluant d'un geste Mackx et Gamling, il se dirigea directement vers Akane, s'enquérissant de son état d'un regard.

Bonjour frères, bonjour Akane.

Se rapprochant de Akane, il s'agenouilla devant elle, examina son teint.

Comment te sens tu ? Tu as déjà des contractions ? Tu penses que tu pourras marcher jusqu'à l'infirmerie ?

Gamling faisait preuve d’une grande efficacité. Discret, réactif, posé, bon nombre de qualités qui faisaient du lui un candidat potentiel aux prochaines intronisations. Ethan avait déjà eu l’occasion de l’avoir sous ses ordres au sein de l’escorte royale, pendant la traversée du Périgord et du Poitou, jusqu’à leur arrivée en Touraine, et n’avait pu que se féliciter de sa participation. Il lui faudrait d’ailleurs penser à présenter un rapport concis de cette escorte quand celle-ci serait enfin terminée. Il aurait aussi à en remercier chacun des participants sans lesquels l’engagement de la Licorne n’aurait pu être aussi pertinent. Mais en attendant, il fallait perdurer dans la promesse qu’il avait faite à Guillaume il y avait de cela une éternité lui semblait-il.

Il se remémora ce soir où le Grand Maître de l’époque était venu le voir et lui avait confié l’étendard de l’Ordre, en le nommant Commandeur de la lance des Licorneux. Il en avait été stupéfait et très honoré dans un premier temps, puis, peu à peu, il avait pris conscience de la difficulté de la mission qu’il avait promis de mener à son terme. Malgré des débuts bien difficiles, Dame Kirah lui avait accordé sa confiance, et lui avait abandonné le soin d’organiser la composition des trois lances des ordres royaux. Jamais il n’aurait pensé que des « guerres » intestines puissent apparaître entre les ordres eux même. Il avait été surpris des réactions de certains, contrit des échos de médisances qu’on lui avait infligées. Heureusement, Zalina l’avait supporté dans ces moments difficiles. Elle lui avait appris bon nombre de choses dont il ne savait encore comment il pourrait la remercier un jour. Mais ce n’était pas là le moment d’y songer …

Le Chevalier au surnom si évocateur, semblait songeur. Il les étudiait sous toutes les coutures, semblant rechercher quelque chose qu’il redoutait. A croire qu’il avait l’esprit embrumé, ou bien avait-il trop abusé de la boisson favorite des Normands pour ne pas constater l’état de son épouse. Il n’allait quand même pas lui refaire le coup du Saint-Esprit ou de je ne sais quel étrange phénomène qui aurait pu se soustraire à lui pour féconder sa Dame ? Mais où avait-il donc la tête ? Il n’y avait qu’à ouvrir les yeux et la contempler, pour réaliser que le terme ne devrait pas tarder. Etait-ce la peur de sa future charge de papa qui l’effrayait ainsi ? Ethan avait entendu bon nombre de choses à ce sujet, entre ceux qui partaient en courant se refusant à assumer, ceux qui tombaient dans une sorte de léthargie leur empêchant toute décision et ceux qui sombraient dans une béatitude profonde. Il n’y entendait rien à tout ceci le Licorneux, qui plus est ce n’était pas là son problème de l’instant. Il verrait ça le moment venu, si cela devait se produire un jour, encore faudrait-il pour ça que … Mais bon …

Ah ben tiens … Voilà qu’il semblait se réveiller enfin pour lui inculquer une leçon de chose. Il pouvait parler lui, à courir partout sans jamais se reposer … Et les autres chevaliers qui en faisaient de même. N’étaient-ils donc pas des exemples à prendre en considération ? Bien sur que si, sinon à quel saint se vouer en ce cas. Et puis comme le lui avaient déjà maintes fois dit Cerrid et Zaza, ils se reposeront tous quand ils seront morts ! Le fond était bon, mais ce n’était certes pas ainsi qu’il lui fallait répondre au papa en puissance.
Sauvé par le gong … Un frère qu’il n’avait jamais croisé, et devant être le fameux Flaiche que Gamling était allé quérir, leur souhaita le bonjour. Sans attendre de réponse, il se préoccupa immédiatement d’Akane, s’enquérant de son état. Il semblait soucieux d’entrer dans le vif du sujet, enfin, si l’on peut parler ainsi d’un accouchement qui ne saurait tarder. Ethan le salua à son tour.
Bonjour frère … Laissant son nom en suspend car ne voulant pas créer d’impair.

Puis, se tournant à nouveau vers Nith et Akane, il se mit en devoir de leur faire part de son choix. Il avait fait ce qu’il avait cru bon, mais il n’était pas là pour assister à la naissance de leur progéniture. Ce n’était pas là sa place, ni sa tasse de tisane par ailleurs. Toutes les bonnes choses ayant une fin, il s’était suffisamment « reposé » pendant leur petit voyage sur les chemins bien sécurisés de Normandie. Il lui fallait désormais retourner prendre sa place auprès des siens, afin de continuer cette escorte, pour peu qu’elle continue, ou bien pour une autre mission qu’on voudra bien lui confier.
Nul besoin de vous inquiéter pour moi. Qui plus est, l’escorte royale peut reprendre son cour d’un jour à l’autre. Je me dois de rejoindre Dieppe au plus vite.
Ah … et tenez moi informé quand il où elle sera là … cela me ferait grand plaisir …

Un grand sourire vint à naître sur ses lèvres. Un de ceux que nul n’avait l’habitude de voir s’afficher sur son visage. Un sourire franc, non réprimé, certainement le fait de savoir qu’enfin un événement heureux allait voir le jour en cette citadelle. Tout à coup pris d’une étrange sensation de gaité, il offrit une tape amicale dans le dos du chevalier, en oubliant toutes les convenances, mais se retint cependant d’aller embrasser sa sœur errante … c’est quand même une Dame !
Sans attendre son reste, il sauta dans la carriole à laquelle il fit faire demi-tour et reprit le chemin inverse … Direction Dieppe !

Invité

Flaiche avait été prévenu. Gamling se sentait chanceux d'avoir pu trouver le médicastre et le chevalier sans trop de complication et surtout rapidement. Le mot déposé sur le bureau de son frère eu l'effet espérer. Aussi alors qu'il errait dans les couloirs à la recherche de ce frère il le croisa. Il avait bien consulter le bout de papier sur son bureau signé de la main de l'Armagnacais. Il vit ensuite Flaiche continuer son chemin jusqu'au poste de garde. En revanche Gamling restait là, immobile, se demandant ce qu'il pourrait, ou plutôt devrait faire.
Quelques longues secondes plus tard finalement il emboita le pas du médicastre pour se rendre aux herses. Il était garde avant tout et avait une surveillance à assurer. Au delà de sa fonction il pourrait depuis son poste aider le petit groupe si une personne supplémentaire était nécessaire. De ce fait quoiqu'il en soit il devait retourner à l'entrée de la forteresse.

Il pressa le pas et bientôt Gamling arriva au poste de garde. Flaiche était bien là, agenouiller devant Akane, parfait. En revanche l'autre Errant prenait la route de nouveau. A mesure que l'homme d'armes approchait il voyait Ethan s'éloigner, et, finalement il repartit dans la même carriole avec laquelle il était venu. Quant au Chevalier Nith, il demeurait ... perplexe. C'est dans ce moment là que certain surnoms prenaient tout leur sens et Gamling comprenait ainsi celui de Nith.
Gamling rejoint le petit groupe. Il ne savait que dire et surtout quoi faire. Il prit conscience de son jeune âge et se sentit petit, trop petit au milieu de toute cette scène qui se déroulait sous ses yeux sans qu'il sache comment y intervenir. Il se contenta de quelques mots.

Je suis là .. Si besoin d'aide ..

Il détourna son regard et s'avança d'avantage jusqu'à se poster derrière les herses encore ouverte, sur le chemin menant a ces dernières. Il fit ce qui lui sembla le mieux, il fit ce qui savait faire de mieux : veillait. Il veillait sur la forteresse mais pas seulement, en priorité sur le petit groupe dans son dos.

Tout se précise…
Tout ce petit monde s’agite devant elle, cela lui donne le tournis. Pas de réaction quand Ethan reprend la route de Dieppe. Elle a du mal, l’errante, et se mord les doigts de ne pas avoir été plus prudente, de ne pas avoir suivi les conseils de son époux quand celui-ci lui avait dit que de prendre les routes dans un tel état était pure folie. Écouter les conseils des autres…Chose qu’elle devrait faire plus souvent, elle, l’Impétueuse.

Les gens ne peuvent changer, ils peuvent que s’améliorer, vaincre leurs démons intérieurs. En l’occurrence, la brune en avaient quelques uns et pas des moindres. Un côté destructeur, qui lui faisait faire bon nombre d’inepties, qui lui avait valu d’avoir jusqu'à présent une vie chaotique...La peur d’être heureuse ?
Certainement…Tout avait basculé lorsqu’elle devint orpheline…Cette rage… Rage qui l’habitait depuis, cette soif de sang versé de sa lame, sang impur de l’ennemi, et son sourire froid qui animait son visage… Elle aimait ces moments.
Et puis, ces badineries… ces aventures sans lendemain…ces amants de passage…
Nith avait réussi à mettre de la stabilité dans sa vie, de l'ordre, et à lui faire voir la réalité de celle-ci. Le seul… Le seul qui avait cette faculté.

Il n’ose pas s’approcher d’elle, impose une distance de sécurité. Pourquoi ?
Encore cette maladie qui le ravage, l’épuise un peu plus chaque jour, cependant, il reste fier, essaye de ne rien montrer et effectue son devoir. Crainte de le perdre. Il était son astre, il aurait fallu du temps pour que la Tempête le réalise enfin.

Une brise souffle sur Ryes à présent, et joue avec sa crinière de jais… Elle tremble légèrement, regarde sa moitié, regard lourd de sens, pour qu'il se rapproche d’elle – Ne me laisse pas maintenant – pensa t’elle en son for intérieur. Et là, une question qui tombe tel un couperet, teintée d’humour.

- Et bien, le bonjour ma chère. Il semblerait que tu m'apportes une surprise, non ?

Une surprise ? Drôle de façon de définir l'événement
Elle reste interloquée un long moment… Une surprise… Non ce n’était pas l’immaculée conception qui l’avait mis dans un tel état. Surtout elle… Aristote aurait certainement choisi quelqu’un de plus chaste pour une telle chose. Avait-il oublié ? Ou bien était il dans un tel état de panique qu’il ne saisissait plus trop bien ce qu’il se passait ?

- Ce n’est pas une surprise mon cher époux. Ta descendance semble vouloir enfin voir le jour. Cela ne saurait tarder.

Elle tend sa main vers le perplexe. Maladie ou non, querelles idiotes ou pas, elle avait plus que jamais besoin de sa présence, de le sentir auprès d'elle.
Point de contractions, mais un ventre qui se durcit de plus en plus. Signe proéminent d’une délivrance ? Ou fausse alerte ? Elle était épuisée, mais ne voulait rien paraître. Flaiche, son nouveau camarade d’infirmerie s’agenouille devant elle, et l’observe attentivement. Questionnement digne d’un bon médicastre.

- Je pense pouvoir avec de l’aide, marcher jusque l’infirmerie, je n’ai pas encore de contractions. Quant à mon état général, je me sens exténuée pour tout te dire.

Selon son calcul, elle n’avait pas atteint le nombre de lunes requises avant l'accouchement. Légère crainte… Peur de perdre à nouveau un enfant. Peur aussi de ne pas survivre.
Elle tente de chasser ces idées noires de son esprit, elle devait garder espoir, elle devait y croire. Non loin de là, Gamling les surveille. Brave recrue qui irait certainement très loin…Elle reprend le fil de la conversation sans rien laisser paraître, digne encore et toujours.

- Alors camarade médicastre, que faisons nous ?

La ronde des intervenants continuait à défiler, certains entrant, d’autres sortant de son champ de vision. Mais il n’avait pour l’instant d’yeux que pour la personne qui se trouvait sous son regard. Cela faisait de nombreux jours qu’ils ne s’étaient pas vus, ni parler, ni même contacter ne serait-ce que par missive interposée. Chacun avait sa mission à remplir, son devoir à assumer avant toute chose, peu importaient les conséquences. Et là, les conséquences se faisaient sentir : éloignement, distance entre deux époux qui auraient dû se rapprochaient. Mais la maladie, les missions, tout ne faisaient que creuser encore plus profondément le gouffre qui les séparait. Peut être que, finalement, il n’était pas fait pour partager sa vie. Peut être que l’errance, la vie en solitaire le sied beaucoup plus, point d’attache, point de soucis, et surtout la possibilité de se dévouer corps et âme pour la Licorne… Mais un serment prononcé était inaliénable, il s’était prononcé devant l’autel, et, malgré les circonstances pour le moins inhabituelles de cette union, même s’il l’aurait voulu encore plus particulier avec pour tenue obligatoire une armure de plate complète, il s’était lié, par les mots, par la volonté, devant elle, devant les invités, devant le Très Haut. Le poids des différents serments se faisaient sentir sur les épaules du Perplexe, de moins en moins sûr de pouvoir tous les tenir. Mais ce n’était point le moment de penser à pareille chose, d’autant que des événements plus urgents requéraient son entière attention.

L’environnement qui l’entourait se faisait de plus en plus vite au fur et à mesure que sa concentration revenait sur le présent. Gamling était revenu, avec lui celui qu’il était parti cherché. Nith se sentit soulagé qu’enfin une personne compétente allait s’occuper de prendre les choses en mains. C’est que, personnellement, il ne connaissait rien en matière médicale, il savait à peine comment se chargeait d’une blessure (cautérisation ou amputation, une vision bien dichotomique…), alors un accouchement, voilà le genre de situation où il était complètement démuni. Il avait « assisté » à un enfantement, il y a de cela très longtemps, mais un mur le séparait de l’événement, ce dont il était pour le moins reconnaissant… Brrrrr… Rien qu’à repenser aux cris qu’il avait entendus, cela lui faisait froid dans le dos… Le médicastre s’approchait de la patiente bien plus près que lui ne l’avait osé, prenant en charge l’état de la dame, la questionnant sur sa condition.

Bien le bonjour, Frère. Je te laisse prendre soin de ta patiente.

Mais voilà que pendant que son attention était attirée du côté de Flaiche, l’Errant en profitant pour se faire la malle, dans la pure tradition attachée à ce rang. Malgré ces conseils, malgré son avis, il avait décidé de poursuivre la tâche qui lui avait été assignée. Ce qui, en soi, était tout à son honneur. Mais il y avait cependant la manière de faire les choses… Même si le Perplexe ne pouvait se permettre de respecter ses propres conseils, il ne pouvait s’empêchait de se faire du souci pour le jeune Ethan, quoi qu’il puisse en dire. Il aurait, cependant, lui ordonner de rester pour se reposer. Il en avait les prérogatives, mais il répugnait à s’en servir. Contraindre ne faisait pas parti de ses méthodes, loin de là… Il préférait permettre à ses interlocuteurs de se rendre compte par eux-mêmes de leurs besoins, de leurs erreurs, pour qu’ils puissent apprendre d’eux-mêmes…

Et bien, bon vent à toi, Ethan. Prends garde à toi surtout. Et ne t’inquiète pas, je suis sûr qu’une certaine personne n’oubliera pas de te remercier !

Retour à la dame. Après tout, elle était au centre de l’attention.

- Ce n’est pas une surprise mon cher époux. Ta descendance semble vouloir enfin voir le jour. Cela ne saurait tarder.

Et bien, voilà donc un grand jour. Mais je doute qu’il serait judicieux qu’il voit le jour sur le pas de la porte de la forteresse… Même si cela pourrait présageait un certain avenir pour cet enfant à naître, je ne pense guère qu’il s’agisse de l’endroit le plus confortable ou le plus approprié pour enfanter…
Mais cela n’est point de mon ressort…

Il se retourna vers Flaiche, attendant qu’il prenne sa décision… Lui ne pouvait plus rien faire à part attendre…

Elle attend une réponse du médicastre, l’errante, et guette la moindre réaction de son époux.
Celui-ci se tient toujours en retrait, ses propos se font secs. Par lassitude, elle baisse son bras, et pose sa main sur son ventre.
Les événements les avaient séparés… Ce froid entre eux… Cette frontière qui se dressait de jour en jour… Pouvaient-ils remédier à cela ? Elle avait besoin de lui, était ce si inconcevable ?

Le vent souffle de plus en plus sur la région, laissant place à début de tempête. Des nuages noirs obscurcissent le ciel. La journée avançait de plus en plus, laissant place au début de soirée. Certaines personnes superstitieuses verraient cela comme un mauvais présage pour un futur enfantement. La brune en fait fi, et sonde l’âme de par son regard azur de son époux. Elle se souvient d’une promesse faite à l’infirmerie quelques mois plus tôt, elle devait lui montrer qu’elle était une toute autre personne. Travail sur soi, qu’elle ne pouvait faire qu’en s’éloignant loin de lui. L’escorte royale tomba à point nommé, seule, elle comprit qu’elle ne pouvait pas changer mais lutter contre ses travers.

Devenait-elle une femme sage ? Elle en suivait la voie en tous cas, même si…le gout de la guerre ne se perdait pas, bien au contraire…
Ce moment à l’infirmerie… Ce regard sur elle et qu’elle avait entre aperçu… Il n’était point le même aujourd’hui… Cet homme… non loin d’elle qui semblait être affaibli par cette maladie qui le rongeait peu à peu. Impuissance, quand tu nous tiens. L’avais tu aidé Akane ?
Il serait mort aujourd’hui, et tu n’aurais rien fait pour lui, à part lui rajouter des maux supplémentaires, garce que tu es… Ravissante idiote…

- Tais-toi ! cria t'elle

Des gouttes de sueur commencèrent à perler de son front… Confusion…Réalité…La brune perd pied, claque des dents et ne s’en rend même pas compte. Sa main, toujours posé sur son ventre, froisse le tissu de sa robe rouge sombre. Elle entend les pleurs de deux enfants, deux filles… Des voix… Celles d’un homme et d’une femme âgée…Et assiste à la scène en spectatrice

- La mère n’aura pas assez de lait pour nourrir les deux enfants, et vous n’avez point les moyens de payer une nourrice. Le mieux… serait de confier la moins faible à une famille qui prendra grand soin d’elle et qui l’élèvera comme leur propre enfant…

L’homme regarde le nourrisson brun… chevelure de jais, yeux bleus azur. Un doigt caresse la joue de celui-ci. Le nourrisson blond pleure de plus belle, comme s’il se doutait de ce qui allait arriver.

- Faites… Mais assurez vous de transmettre cette chaine et cet anneau au chef de famille…

La femme âgée s’exécute et prend l’enfant emmailloté dans ses bras. Akane à l’impression que ses trippes se déchirent. Elle hurle.

- Non ! Ne faites pas ça ! Ne les séparez pas !

Bref retour à la réalité… Sa vision est floue… Elle ne distingue que des formes… Elle tend son bras en direction de son époux.

- Nith…

Sa voix se veut quasi implorante…Plainte lancinante… Un liquide s'écoule le long de ses jambes et tombe sur le sol boueux de Ryes.

Situation apparemment sous contrôle. Sa soeur allait pouvoir se rendre lentement à l'infirmerie, sous leur garde bien sur, cela pourrait même aider l'enfant à naitre à avancer un peu l'heure de son arrivée. Marcher et monter des escaliers étaient reconnus pour favoriser un accouchement rapide.
Bien, ils allaient donc rejoindre l'infirmerie, le futur père étant présent cela simplifierait grandement les choses. De plus ils n'auraient pas à pratiquer un accouchement dans des conditions extrêmes en plein milieu de l'entrée de la forteresse. Tout ceci s'annonçait donc bien mieux que Flaiche ne l'avait craint.
Le médicastre s'apprêtait à répondre à la future mère, la regardant avec un sourire confiant, quand la discussion entre époux et épouse semble prendre une tournure fort désobligeante. Grimace du médicastre.

Il se relève, se tournant vers Nith, mais a tout juste le temps de commencer sa phrase que la future mère donne des signes de malaises, ceux ci débouchant sur une perte des eaux. Liquide coulant le sol, nouvelle grimace du médicastre. Il n'allait pas falloir trop trainer, si la perte des eaux n'était pas en soit un évènement qui incitait à la précipitation, elle signifiait tout de même qu'il ne leur restait pas des heures avant que le bambin ne soit là. Une mise au point rapide était cependant nécessaire.
Regardant fixement Nith, il garda un ton calme et posé, voulant montrer aiu chevalier qu'il savait ce qu'il faisait et qu'en cet instant, rien n'était plus important que ce qu'il allait dire.

Frère Nith, en tant que médicastre qui va devoir accoucher ton épouse, écoute moi bien. Je ne sais si il y a quelques soucis en qui planent au dessus de vos têtes en ce moment, cela dit, il va falloir les mettre de coté pour aujourd'hui. Je vais avoir besoin de ton aide, pas d'un homme dont le discours va provoquer la tension et l'énervement de ma patiente. Votre enfant va naitre, c'est un grand jour pour vous deux comme pour lui. Cela dit avant cela, on va faire en sorte tous ensemble que tout se passe bien. Prend cette épreuve comme un combat à mener si cela peut t'aider, mais je te promet que si tu gènes ou interfère, je te met dehors de l'infirmerie. Cela dit, Akane aura bien plus besoin de toi à ses cotés. Bien, maintenant qu'elle a perdu les eaux, il nous faut ne pas trop tarder. Aide moi donc à la soutenir, il nous faut nous rendre à l'infirmerie. Comme tu l'as si bien souligné, nous ne sommes pas dans l'endroit idéal pour accoucher une sœur, ses chances de survie ici serait bien trop faibles. Cela dit ne nous alarmons pas, il me faut juste matériel et produits divers, et tout cela se trouve à l'infirmerie.

S'approchant à nouveau d'Akane, il posa sa main sur son front, constatant ce qu'il avait redouté lorsqu'il avait vu ses yeux trop brillants appelant son mari. Fiévreuse, surement en proie a des délires vu sa façon d'implorer son époux, il se pencha vers elle, la prévenant surtout pour tenter de la tirée de sa torpeur:

Bien, nous y voici. On va monter tranquillement, sans forcer. On va t'y aider, car il faut absolument qu'on atteigne l'infirmerie. Heureusement elle n'est pas loin. Si tu ressens une douleur, on fera une pause. D'accord ?

Flaiche prit délicatement le bras, n'attendant pas vraiment de réponse a ces paroles de part l'obligation de se rendre à l'infirmerie pour pouvoir accoucher dans des conditions convenables. D'un signe de tête, il exorta Nith de faire de même avec l'autre bras, la soutenant ainsi parfaitement. Ils commencèrent à avancer, lentement.
Une brève pensée vint assaillir le médicastre. Il allait devoir découvrir ce qu'il ne connaissait pas encore de l'infirmerie, c'est à dire la majeure partie de celle ci, en même temps que d'accoucher sa soeur. Sans aide, cela pourrait s'avérer difficile. Heureusement, ses recherches des diverses plantes poussant dans la forteresse l'avait conduit à faire une liste des divers plantes et médecines que la salle de soin renfermait. Cela serait déjà mieux que rien. Il lui faudrait en apprendre d'avantage, mais pour cela, il leur fallait déjà atteindre le lieux.

La situation ne tournait pas vraiment de la manière dont il l’avait envisagé, même si, en fait, il n’avait rien imaginé du tout. Si on lui avait dit qu’aujourd’hui il allait retrouver son épouse prête à accoucher sur le pas de la porte de la forteresse de Ryes, il ne l’aurait pas cru… Mais c’est surtout le fait que cela arrive alors que lui vient à peine de se réveiller, assoupi par la lecture de multiples rapports tous aussi intéressants et passionnants qu’un corpus législatif au si nombreux tomes… Rien qu’à y repenser, il en avait des frissons dans le dos. Et même si la voie de la justice correspondait en bonne partie à ses aspirations, il n’avait jamais été un fanatique des longs textes de lois, cela limitait le talent à l’improvisation du juge…

Ili attendait une réponse, certes, mais pas forcément celle qu’il venait d’entendre. IL comprenait que sa manière assez nonchalante et sarcastique pouvait facilement énerver ses interlocuteurs, il avait pris cette habitude depuis déjà bien longtemps. Il était effarant comment tout ou presque pouvait passer avec une pointe d’ironie, même les sujets les plus délicats. Cependant, il y avait certaines personnes avec lesquelles cela ne fonctionnait pas vraiment, où il n’arrivait pas vraiment à passer sur ses sentiments pour pouvoir relativiser les choses. Ces moments étaient rares où il se laissait emporter par le flot de ses émotions, et les rares moments qu’il passait en compagnie de celle qui était pourtant sa femme en faisaient partie… Mais là, il était encore vaseux d’avoir été réveillé lors de sa sieste inopinée, on l’avait rapidement mandé, d’où sa crainte d’une mauvaise nouvelle requérant son attention. En tout cas, réfléchir calmement ne lui était pas encore permis, son esprit encore trop embrumé par son assoupissement…

- Tais-toi !

Le Perplexe se retourne vers l’origine de ce cri, étonné, surpris… Elle s’adressait à lui, là? Il ne saurait le dire, mais ce n’était alors pas la réponse à laquelle il s’attendait… Pourquoi devait-il se taire? Qu’avait-il dit de mal, il n’avait prononcé aucun mot ayant pour but de provoquer une pareille réaction de colère chez son épouse. Alors pourquoi une telle réaction ? Rhalala, il ne comprendrait décidément rien du caractère et du comportement de la gente féminine… Mais, finalement, ce n’était pas aussi bizarre que les paroles qui furent prononcées à la suite… « La mère »… Et voilà qu’elle parlait d’elle à la troisième personne. Soit elle devait être dans un tel état de panique qu’elle ne se rendait plus vraiment compte qu’elle parlait d’elle, soit elle avait perdu la tête… Deux enfants à nourrir… Hein ? Mais depuis quand il y avait deux enfants ? Il n’en savait rien d’abord, mais elle, comment pouvait-elle le savoir ? Pas de quoi payer une nourrice ? Et bien, soit elle avait perdu toute notion des terres qu’ils possédaient à eux deux, soit elle n’était pas douée pour le calcul et la gestion des fonds… Envoyé l’un des enfants à une autre famille ? Et puis quoi encore… Quelle honte pour eux deux s’ils n’étaient même pas capable d’assumer la charge de leurs enfants… Ils seraient la risée de bon nombre de gens… Transmettre une chaine et un anneau… En voilà des idées farfelues… Mais de quoi parle-t-elle ? C’est eux les chefs de famille, alors pourquoi vouloir se transmettre quelque chose que l’on possède ou que l’on est censé possédé à soi-même ? Il n’y comprenait vraiment rien à rien… Et finalement, son nom, prononcé de manière si douce comparée aux plaintes, réclamations et exigences précédentes…

Un bras se tend dans sa direction, mais il ne sait comment s’y prendre. D’une part, il présente toujours des réticences à trop se rapprocher d’elle, de risquer la contagion, ce dont elle pouvait sans conteste être dispensée… D’autre part, il n’avait jamais eu affaire à une telle situation, une personne perdant complètement le sens de la réalité. Crainte et appréhension se répandaient comme de l’huile dans son esprit. Et, finalement, il n’était jamais bon ni avisé de trop de rapproché de ceux touchés par le Très Haut…

Les propos de Flaiche le tirèrent de ses sempiternelles cogitations, mais pas de la meilleure manière. Stupeur et colère remontaient au sommet de ses émotions. Mais il n’y était pour rien là-dedans ! Il n’avait rien de dit de fâcheux ou de désobligeant, pas d’insulte ni de reproche, ou alors il avait lui aussi perdu complètement la tête… Et voilà qu’on l’accusait de provoquer tension et énervement chez son épouse. C’était le comble ça, on lui demandait de venir, et maintenant on lui reprochait sa présence qui perturbait celle pour qui il avait été mandé. Et pour couronner le tout, on insinuait qu’il pourrait gêner ou interférer… Et bien, s’il l’avait su avant, il ne serait point venu du tout, cela aurait sûrement été beaucoup plus simple pour tout le monde… Si la situation ne fut pas aussi préoccupante, il ne se serait guère retenu, mais dans les conditions présentes, il ravala les répliques sanglantes qui lui vinrent en tête.

Il avait raison sur au moins un point : il fallait la transporter dans un lieu plus convenable de toute urgence. Mais lorsque le médicastre l’intima de l’aider à soutenir la patiente, le Perplexe hésita : trop de proximité pourrait être préjudiciable, mais il n’y avait pas d’autres personnes disponibles sous la main. Il aurait certes pu demander à Gamling d’aider Flaiche dans sa tâche, mais lui aussi avait une mission à accomplir, et le Normand ne se sentait pas vraiment d’humeur à surveiller le poste de garde. Il se résigna finalement, espérant qu’il avait pu récupérer suffisamment de force pour pouvoir soutenir et son épouse et son propre corps, et priant intérieurement pour que rien de fâcheux n’arrive, enfin rien de plus… Pas un regard vers les autres participants de cette petite « balade » improvisée, ni même un mot. Contrariété, mais surtout le besoin de concentration sur sa tâche obnubilait son esprit pour le moment alors qu’il se dirigeait vers l’infirmerie…

» Un, deux, trois, nous irons... Ben essayer de pas se perdre déjà...
» Tiroir D - Fiche médicales: chevalier errants (archives)
» [RP]Entraînement entre deux soeurs
» [RP] Retour... ou pas...
» Un retour...