Arrivée des Baccards

La route est longue jusqu'à Ryes, surtout lorsqu'on part du fin fond des montagnes du Lyonnais-Dauphiné, des Hautes Alpes pour être exact.
Mais pourquoi entreprendre un tel voyage ? Surtout lorsque l'on est Duc et que l'on pourrait envoyer pratiquement n'importe qui à notre place...Et bien c'est justement pour ça !

Y'en a marre de ne jamais rien faire par soit même à la fin ! Une vie entière dévouée à la discipline militaire, au service d'un peuple, d'une terre, d'un idéal.
Une vie passée à se lever aux aurores, à rembourrer sa paillasse et à la mettre au carré, à entretenir un uniforme que sa femme trouve laid mais que lui trouve parfait pour ce qu'il représente et les souvenirs qu'il lui évoque, à cirer parfaitement ses bottes, à entretenir rituellement...presque religieusement chacune de ses armes et de ses pièces d'armures.
Après une telle vie, il avait goûté à l'embourgeoisement, à la noblesse, aux privilèges...Très vite il avait montré son agacement lorsque ses propres "serviteurs" refusaient pratiquement de lui obéir alors qu'il voulait brosser son cheval lui même, ou préparer le bain de son épouse, ou simplement aller faire un tour au marché parmi ses sujets, gens qu'on lui avait octroyé en même temps que les terres et dont il se sentait à la fois si proche et terriblement éloigné.

Mais la guerre avait frappé ! De la retraite il fut sorti, par son Capitaine qui avait besoin de l'expérience des seuls vétérans qui lui restaient.
Mais la guerre avait frappé ! Et elle apportait avec elle un tas de souvenir d'une jeunesse exaltée qui semblaient provenir d'une autre vie, peut être antérieure.
Mais la guerre avait frappé ! Et malgré l'horreur qu'elle apportait, ce fut comme si l'air emplissait à nouveau ses poumons. A nouveau il se sentait utile, à nouveau il se sentait apprécié non pour quelques titres mais pour le service qu'il apportait au bien commun.
Mais la guerre avait frappé, et le Lyonnais-Dauphiné accueilli...Les chevaliers et tous les braves qu'ils commandaient.

Il fut alors témoin d'une vaillance qui l'ému, d'une abnégation telle qu'il n'en avait plus observée depuis tant d'années y compris de lui même, rouillé, encroûté dans la paresse morale.
Et ce qui frappa après la guerre, ce fut l'envie d'un renouveau, l'envie qu'avait fait naître ces hommes et femmes dévoués, résolus à poursuivre jusqu'à la mort une cause communément et personnellement reconnue comme plus grande qu'eux.

Il en avait parlé à son épouse, elle qui était concernée, qui était la duchesse régnante lors de la guerre...Elle nourrissait la même envie, elle n'avait simplement pas trouvé le temps de lui en parler.
L'Impétueux vit cela comme le coup de marteau du destin, il écrivit une lettre à Walan de Meyrieux, un frère d'arme depuis aussi loin qu'il s'en souvenait, doublé d'un mentor, triplé d'un ami...Mais le doublé comme le triplé resteraient sans doutes des faits implicites et probablement jamais verbalisés.
La réponse fut rapide, et c'est muni de leurs réponses que les Baccards avaient prit la route pour la forteresse de Ryes...En Normandie ! La région des pommes ! Dieu que le Baccard détestait ce fruit...

Nombre de messages : 264 Grade : Ecuyer Date d'inscription : 19/05/2017

Les gardes alertèrent Orthon sur la venue d'un homme. Il se pencha du haut du rempart, Orthon pouvait le voir également se diriger vers la forteresse. Il emprunta, d'un pas sûr, le chemin de ronde et descendit un escalier qui le mena près du poste de garde.

Il fit signe aux sentinelles de la herse d'avoir l'oeil et le bon. Ne pas se focaliser sur l'étranger mais toujours regarder en deça afin de ne pas être surpris par une bande de marauds.

Bien le bonjour dit Orthon en voyant le gaillard s'approcher. Vous vous approchez de l'enceinte de l'Ordre Royal de la Licorne ! Que puis-je pour vous ? Quel est le but de votre venue ?

Orthon observait le voyageur sans animosité et attendit une réponse.

La Normandie.. si Axel avait compris que Ryes était situé en Normandie à coup sûr son élan aurait été coupé. La Blonde boudait donc d'une moue empruntée vraisemblablement à sa nièce. Ce n'était pas qu'elle n'aimait pas la région c'était plutôt avec les Normands qu'elle avait un contentieux et pas un petit puisque son ex époux était normand.

Bon l'essentiel était non pas la destination mais le but disait l'homme sage, Axel chassa donc ses sombres idées et songea au pourquoi de leur périple. La Chevalerie !
Oui bon d'accord Axel et chevalier dans la même phrase c'était à peu près aussi crédible que discours bref de celui vers qui elle s'était tournée pour cette entreprise. Mais elle savait qu'elle avait de quoi apporter à un ordre de chevalerie au pire elle serait chargée du débourrage des poulains... Il est toujours utile d'avoir quelqu'un de léger qui sait rester en selle et dont la main peut être aussi douce que ferme s'il le faut. Pour le reste... et bien elle aviserait. Elle avait eu sous les yeux l'exemple de chevaliers si fabuleux lors de la dernière guère qu'elle voulait tenter de leur arriver aux éperons.

Alors qu'elle sommeillait presque, bercée par le cahot de la route, elle fut tirée de sa torpeur par le calme soudain et une voix .

Ouvrant un oeil à demi, elle laissa son Géant s'adresser au garde de la forteresse.

A l'issue de la route se trouvait le but tant espéré : la forteresse de l'Ordre Royal de la Licorne.
Alors qu'ils cheminaient tranquillement vers la grand porte, en rêvant d'un bain pour virer toute cette terres et ce sable de leurs jointures, un homme perché en haut des remparts, sur le chemin de ronde, les interpella afin de leur demander l'objet de leur visite.

Thiberian sourit en voyant cette façon de faire quelque peu archaïque mais si l'on n'aime pas l'archaïque devenir chevalier n'a aucun sens n'est ce pas ?
Il regarda l'homme et s'écria de sa voix de vétéran :

Bonjour l'ami !
Je suis Thiberian Baccard et voici mon épouse Axel Baccard d'Irissarri.
Nous sommes ici pour joindre notre âme et notre épée aux vôtres, si vous voulez bien descendre pour vérifier la lettre scellée de Son Altesse Walan de Meyrieux...Sur mon honneur je jure que nous sommes venus seuls.

Il montra le courrier déplié bien en évidence :

Walan a écrit:: A Thiberian Baccard dict "L'Impétueux", Duc de la Val d'Oze, Vicomte de Guillestre, Baron de Voiron et d'Aix en Diois, Seigneur du Bois d'Oingt,

Bonjour,

Au nom de l'Ordre royal de la Licorne et suite à la candidature que vous m'avez envoyée, j'ai le plaisir de vous annoncer que le Haut Conseil accepte votre intégration à l'ordre en tant qu'Homme d'Armes. Je ne doute pas que cela nous rappelle à tous deux une autre époque.

Je vous invite à vous rendre si tôt que vous le pourrez à la forteresse de Ryès* muni de cette missive, où vous serez accueilli et où commencera votre vie dans l'ordre.

Puisse le Très Haut vous accorder sa grâce,
Walan de Meyrieux, chevalier de l'Ordre de la Licorne.

Nombre de messages : 264 Grade : Ecuyer Date d'inscription : 19/05/2017

Orthon observa par la herse le sieur Thiberian dérouler un parchemin, tout en constatant qu'il était accompagné d'une jeune femme, son épouse, qui semblait sortir d'un profond sommeil, installée douillettement dans une carriole. Il ne l'avait pas vu au premier abord, couchée qu'elle était. Il vit son visage apparaître.

Orthon prit le manuscrit à travers la herse, lisant sérieusement le pli.

Hum, je ne vois que votre nom d'inscrit. Fort heureusement mon supérieur, en la personne de Walan de Mayrieux, m'a averti de la présence de votre épouse.

Orthon fit signe à deux sentinelles de lever la herse qui se souleva au gré du son des chaînes.

Mon frère, ma soeur, soyez les bienvenus dans nos murs ! Que la Justice, l'Honneur et la Bravoure guident vos pas !

Orthon salua le couple et se permit d'offrir des chouquettes au foie gras, spécialité du Périgord-Angoumois.

Votre voyage a peut-être été long, voici de quoi faire disparaître la fatigue.

Ah mince il fallait sa lettre aussi ... mais le temps de farfouiller et alors qu'axel s'apprêtait à lui refiler le pli, le garde avait déjà fait lever la grille . Elle le remercia d'un geste de la main et vérifia sa mise. Chevalier ou pas Axel restait Axel et le jour n'était pas venu où elle se moquerait de son apparence.

La Blonde apprécia l'homme qui les accueillait instantanément grâce aux chouquettes et s'il avait su qu'il la pensait jeune elle l'aurait carrément embrassé. Oui cash comme devant le mari ! Pourquoi les chouquettes me direz-vous par goût déjà et puis parce qu'une seule contrée les produisait : le périgord angoumois ! Celui la même qui avait vu grandir vivre mourir et ... revivre sa douce amie . Décidément dernièrement tout la rapprochait de Mahaut. Il lui faudrait trouver un moment pour aller lui rendre visite mais bon pas tout de suite ...

Merci bien en effet ce fut long et pénible ! A vrai dire nous avons traversé le Royaume de part en part .

Nombre de messages : 264 Grade : Ecuyer Date d'inscription : 19/05/2017

Orthon entendit la jeune femme pour la première fois. Il était content que les chouquettes aient toujours autant de succès.

Je suis fort aise que vous ayez pu rejoindre notre forteresse en cheminant par les routes et chemins du royaume. Il n'est pas toujours simple de voyager car des ombres rôdent toujours.

La herse était entièrement relevée.

Je vous invite, mon frère, ma soeur, à aller poser vos affaires dans le dortoir des Hommes d'Armes. Il se trouve dans la Tour Hestia. Bien evidemment, vous avez droit au dortoir des dames ma soeur. Il faudra également vous rendre à l'infirmerie de l'Ordre pour remplir un dossier médical. Pour vos monture vous pouvez les mettre aux écuries.

Les accompagnant sous la voûte de l'entrée, il leur indiqua la direction de chaque lieu cité.

Soyez encore les bienvenus dit-il en reprenant son poste. Si vous avez besoin de quoi que ce soit, demandez Orthon et je tâcherai de vous aider.

Tour Hestia, infirmerie, écuries... d'accord d'accord. Dortoir des femmes. Hein quoi ? Non mais je ... pas de trucs de couples ? Han mais c'est quoi ici le Moyen Âge ou quoi ???
( on me souffle que oui dans l'oreillette? Ah mince bon ok..)
Axel faillit répondre qu'il était hors de question, elle faillit s'énerver, se débattre, vociférer même ! Mais rien juste un discret soupir qui pouvait passer pour du soulagement. Son corps fourbu par le voyage n'aurait pu supporter aucun débordement de toute manière. Elle adressa un regard à son Géant du genre tu perds rien pour attendre en mode toi seul tu sais. Puis laissa glisser un sourire sur ses lippes pour répondre au garde.

Ah hum .

D'accord... Merci .

Axel laissa le garde partie et regarda Thib d'un œil mauvais .

Tu savais pour cette histoire de dortoir ? Et ils vont tous m'appeler ma sœur comme ça ? Et je devrais t'appeler mon frère ?

Il était certain qu'il lui faudrait un temps d'adaptation à la Précieuse. ..

[edit pour coquille de mon telephone qui parfois décide lui même de ce que je dois écrire...]

Gauvin avait dit à Orthon qu'il ne serait pas loin quand il accueillerait les nouveaux hommes et femmes d'armes. Histoire de l'aider en cas de difficulté, de stopper toute erreur pouvant porter atteinte à la sécurité de la forteresse.

Il était allé au poste de garde, présent juste au dessus de la herse. Il observait les deux arrivant par une des meurtrières, mais il écoutait surtout les dire d'Orthon.

Gauvin était content de la prestation de l'homme d'arme il avait attendu confirmation de l'invitation, il était polis et respectueux. Il avait indiqué les premiers endroits où toutes nouvelles recrues devaient se présenter.

La femme d'arme le fit sourire, il sentait bien qu'elle était de la haute noblesse, mais ici pas de titre, pas de privilège et un exercice en préparation qui allait surement être difficile pour elle si elle a peur de la boue. Mais elle pourrait vite dépasser ça grasse à la camaraderie et à l'esprit d'équipe qui soude les membres de l'Ordre.

Quand Orthon arriva dans la pièce par l'escalier, la herse redescendait il lui dit alors.

Tu t'es vite habituer au poste de garde mon frère. Je trouve que tu t'es bien débrouillé pour l'accueil je te félicite, mais le prochain coups attend que la herse soit complètement abaissé avant de remonter, on ne sais jamais.

L'homme se révéla des plus aimables et l'accueil fut pour le moins inattendu, le géant blond n'était plus de prime jeunesse et entendre un jeune homme encore vert l’appeler "frère" le déstabilisa, il ne tolérait plus les familiarités depuis longtemps mais ce ton à nouveau réveilla en lui des souvenirs parmi les plus précieux. Cette complicité lui rappelait tant les frères d'armes avec qui il partagea les rangs tant d'année qu'un sourire éclaira son visage, et il répondit :

Merci pour cet accueil mon...Frère, pardonnez moi je n'ai pas encore l'habitude de cette formulation.
L'adaptation est le maître mot, je m'y ferais comme au reste.
Merci pour ces indications, je me rends au dortoir immédiatement.

Il n'avait pas besoin de regarder sa femme pour savoir qu'elle allait tiquer sur cette histoire de dortoirs, à vrai dire lui même n'avait pas prédit ce coup là mais en y réfléchissant c'était pourtant logique.
Il la regarda suite à sa remarque et sourit en caressant sa joue :

Non je ne le savais pas, et je supposes que oui...Les membres des ordres sont tous frères et sœurs, il faudra nous y faire.
Vois ça comme une simple épreuve d'entrée, qui sait si les choses pourront ou non changer par la suite.

Je pense qu'il faudra t'habituer petit à petit à faire les choses seule mon ange, c'est pour ça que nous sommes là et c'est ainsi que nous deviendront une petite partie de cette grandeur dont nous avons pu être témoins. Je doutes que tes suivants puissent rester éternellement...Ne t'en fais pas, tu y arriveras j'en suis sur et je suis très fier de toi pour ce que tu entreprends.

On se voit très vite.

Il l'embrassa avant de partir en direction du dortoir indiqué.

"Mon ange gnia nia nia . Je pense que nia nia nia... t'adapter nia nia nia seule nia nia. .."quewa ????
L'esprit de la Blonde sursauta . Plus de suivantes? Se débrouiller seule . Non mais allô quoi , je suis une fille et je me suis jamais fait un shampoing seule !!!
Axel se figea un instant . Depuis sa naissance, elle avait toujours eu des serviteurs. Quelqu'un pour lui préparer ses vestures et l'aider à lenfiler , quelqu'un pour lui brosser les cheveux si elle avait fort beaux et longs du coup. Elle avait même toujours eu quelqu'un pour lui frotter le dos dans le baquet, c'est dire... C'est tout juste si elle savait encore lacer son corsage ! Une angoisse violente lui serra la gorge .
Tant et si bien qu'elle ne répondit pas au Géant qui semblait renaître seconde après seconde.
Elle imagina qu'après avoir vécu sa vie, il lui présentait la sienne . Vis ma vis de troufion succédait donc à vis ma vie de duduche. Et ça promettait d'être savoureux, enfin surtout pour les observateurs, parce qu'elle se retrouvait 20 ans en arrière quand, pour impressionner son époux d'alors et surtout le surveiller... Elle s'était engagée à l'Ost du LD. Les souvenirs de l'insoutenable promiscuité de son mari avec ses si chères recrues remontèrent a la surface.
En cet instant, l'idée des dortoirs séparés fut une bouffée d'air frais. La Précieuse ne craindrait donc pas que le Géant puisse passer ses nuits auprès d'une autre . La Blonde aurait tant à gérer qu'il ne lui serait pas possible d'avoir à gérer sa jalousie maladive en plus du reste. La séparation des genres était donc finalement bienvenue.
Elle n'avait toujours pas répondu à Thib, abasourdie, stupéfaite de tout ce qu'elle avait à digérer en quelques secondes . Elle se laissa embrasser et étreindre, s'accrochent à sa pelisse avec une pointe de désespérance. Quand elle retrouva la parole et lui adressa un : à plus tard, sans saveur. Le Géant était déjà loin. Elle suivit ses pas jusqu'à la Tour Hestia a la recherche de son dortoir.

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