Jamais bon chien n’aboie à faux

Après sa visite initiale du chenil -enfin, de ses nouveaux occupants-, le Grand Maître était retourné vaquer à ses occupations et ce n'est que le lendemain en début d'après midi qu'il revint aux nouvelles. Il avait observé un moment encore les différents chiens et leurs attitudes, tout en tâchant de voir si celles-ci avaient changé depuis la veille, en attendant que Thiberian le rejoigne. Il interrogea celui-ci d'emblée lorsque ce fut fait :

Pas de mauvaise surprise jusqu'à présent ? Ils ont commencé à se faire au lieu ?

Quand le Grand Maitre arriva, Thiberian était dans l'enclot avec une pelle et un seau, occupé non pas à faire un château de sable mais bien à ramasser les plusieurs kilo de cadeaux odorants laissés par les chiens.
Il aurait pu le faire faire par un palefrenier bien sur mais c'est seulement en voyant les selles des animaux qu'il saurait si leur régime alimentaires est le bon, c'était un peu la partie sympa du boulot quoi !

Ramassant le dernier paquet il remit le seau à un palefrenier avec pour consigne de jeter le tout dans le compost du jardin des simples puis il se retourna et ouvrit l'enclot pour laisser entrer Walan tout en répondant :

Hmm non rien à signaler, les rations vont être à ajuster pour chacun mais le régime semble leur convenir, je vais pouvoir embaucher un palefrenier pour les tâches qui vont devenir automatiques. Il faudra bien sur le former à s'occuper de chiens mais c'est moins compliqué que les chevaux.

Une fois qu'il fut entré et l'enclot refermé, il donna à Walan plusieurs lanières de viande de bœuf et un sabot avant de se diriger vers les box :

Garde le sabot pour la fin, quand tu n'auras plus rien à lui demander, il en a pour une grosse demie heure à s'acharner dessus.

Puis il ouvrit le box et lâcha la bête, lui flattant l'encolure pour le rassurer :

Allez Esus, viens.

Mais le chien resta assis, le port haut, fier, soit il n'avait pas comprit l'ordre, soit il n'avait pas l'intention de bouger.

Ah ! Ma foi, on va donc commencer par le rappel.

Se retournant vers Walan il reprit :

Choisis un seul et unique mot par tâche, là tu souhaite qu'il vienne donc tu peux choisir "viens", "viens là", "viens ici", "là", "ici", "au pied", ce genre de choses il faudra juste t'y tenir.
Appelle le par son nom à chaque fois pour qu'il s'y habitue, son nom actuel ou celui que tu souhaite lui donner peu importe...De toutes façons on finit toujours par leur donner un surnom avec le temps.

Il a l'air fier, et donc têtu, tu risques de devoir répéter de nombreuses fois ton ordre avant qu'il daigne faire quelque chose, tu ne dois pas te lasser le premier.
Au début récompense le à chaque fois qu'il fait quelque chose de bien.

Il s'écarta donc légèrement pour observer la suite.

Walan avait écouté attentivement Thiberian tandis qu'il lui donnait ses conseils. Si "comme tout le monde", le brun avait toujours vu des chiens dans ses environs, il ne s'était jamais intéressé à leur dressage et avait donc tout à apprendre sur le sujet. Saisissant la viande et le sabot, il observa Esus un moment, avant de tenter un premier appel tout en montrant l'un des morceaux qu'il tenait à la main.

Esus, ici.

Le chien, manifestement peu convaincu, regarda d'abord Thiberian, puis le Grand Maître, puis Thiberian, penchant la tête de côté d'un air sceptique. Pas vraiment surpris, le chevalier appela à nouveau, montrant un peu plus la viande.

Esus, ici.

La réaction ne fut pas vraiment meilleure, si ce n'est que l'attention du cane corso sembla se porter un peu plus sur le morceau de bœuf qui lui était proposé. Pas assez toutefois pour le décider à bouger, manifestement. Sans Repos réitéra encore plusieurs fois sans beaucoup de succès, mais il comptait bien ne pas se laisser avoir par un jeune chien, et il persista donc encore un moment jusqu'à ce que...

Esus, ici !

Cette fois, le mâle finit par approcher. En prenant son temps, un peu méfiant, mais par approcher tout de même. Lorsqu'il fut assez près, Walan lui lança doucement la lanière de viande... que le molosse saisit au vol avant de la laisser tomber à terre, où il tenta de la récupérer tout en surveillant que personne ne semblait vouloir lui voler. Dès qu'il l'eut à nouveau entre les dents, il s'éloigna à nouveau de quelques mètres pour se coucher le temps de la manger. Regardant Thiberian, le Grand Maître haussa une épaule.

J'imagine que c'est un début.

Retournant son attention vers Esus, qui avait avalé sa récompense quasiment d'une traite, il recommença son manège en l'appelant à nouveau.

Esus, ici !

C'était amusant pour le Baccard de voir un domaine où Meyrieux n'excellait pas autant sinon plus que lui, il y en avait surement d'autres l'ennui étant qu'ils avaient souvent les même points faibles : la joutes, l'archerie, etc et le Baccard n'avait aucunement envie de savoir lequel était le moins nuls parmi les deux mauvais qu'ils étaient dans certaines disciplines !

Cependant Walan s'en sortait bien, le chien était circonspect mais ne semblait pas si têtu, avec l'habitude du lieu et des odeurs il serait vite très sociable comme tous les représentants de sa race, en effet les Cane Corso sont très affectueux et protecteurs vis à vis de leurs maîtres.

Le chien finit par obéir et obtint sa récompense, et sans qu'il n'ait à le dire Walan recommença le manège une nouvelle fois.

Voila c'est ça, une fois qu'il a comprit et qu'il a été félicité il faut recommencer tout de suite pour imprimer ça dans son esprit.
Pour les ordres de base comme assis, couché, debout il faut associer l'ordre à des manipulations qui, par l'anatomie du chien, le feront faire naturellement ce que tu attends de lui.
Pour assis par exemple tu attires son attention sur la nourriture et tu la déplace de devant lui à au dessus de sa tête, pour la suivre du regard il sera forcé de s'asseoir. Quand c'est fait tu récompense, tu félicites et tu recommence jusqu'à ce qu'il ait associé le mot à l'action.
Pour couché tu fais pareil sauf que du déplace la viande vers le sol et tu prononce un "non" ferme chaque fois qu'il se penche simplement pour la prendre, ça permettra de lui apprendre le "non" et même temps que le couché. Quand il y parvient toujours pareil, récompense, félicitations et répétition.
Et pour débout, qu'il soit assis ou couché tu fais le geste inverse pour ramener la viande à hauteur normale et devant lui, et même rengaine quand il réussit.

Donner la patte n'est pas très utile mais c'est facile à apprendre, tu lui saisis la patte en disant "donne la patte" ou "la patte", tu fais ça un certain nombre de fois. Ensuite tu tends la main devant lui en prononçant l'ordre et quand il y parvient, toujours la même rengaine.

Il regarda le GM un moment et reprit :

Avec le temps tu comprendras que tu peux tout lui apprendre en adaptant cette logique éducative simple, de toutes façons il sera aussi éduqué ici par moi et ceux qui viendront travailler avec moi.

Je te laisse essayer un nouvel ordre et quand tu auras fini tu pourras lui donner son sabot, pour l'apprentissage de chose qu'il n'a encore jamais vu il suffit de le faire 15 à 20 minutes par jour, plus serait contre productif, ils n'ont pas la même faculté de concentration que les Hommes forcement.

Au passage, as tu ramené une vieille chemise ou autre linge portant ton odeur pour qu'on lui mette dans son box ?

Écoutant Thiberian, Walan cherchait toutefois toujours à attirer l'attention d'Esus pour qu'il revienne vers lui. Sans grand succès pour l'instant, il faut dire que déjà en l'appelant c'était assez aléatoire, alors sans... Acquiesçant aux explications du maître d'armes, il

J'ai un très vieux gambison d'entraînement oui. Il doit surtout sentir la vieille sueur à vrai dire, parce qu'il a beaucoup servi.

Avec un bref sourire en coin, le chevalier désigna un baluchon qu'il avait pris posé près de l'enclot en arrivant, avant de reprendre avec une question.

Il vaut mieux ne l'entraîner qu'à une instruction à la fois, ou je peux alterner ? Une fois l'appel, une fois la position, ce genre de chose ?

Tout en écoutant la réponse, le brun appela à nouveau.

Esus, ici !

Il lui fallu encore un peu de temps et plusieurs appels, tout en remuant un nouveau bout de viande, pour que le chien s'approche. Son attitude était toutefois déjà un peu moins méfiante que la première fois, ce que Walan considéra comme encourageant. Comme Esus s'était installé un peu moins loin pour engloutir sa récompense, le brun s'éloigna un peu plus pour reprendre son manège.

Esus, ici !

L'exercice se poursuivit encore un moment, progressant lentement mais sûrement -du moins telle était l'impression du grand maître-, jusqu'à ce que le dauphinois estime qu'il était temps de s'arrêter et récompense le cane corso du fameux sabot. Observant les premiers démêlés d'Esus avec, Walan finit par ressortir de l'enclos en commentant pour Thiberian.

Il a l'air de commencer un peu à comprendre non ? En tout cas, il n'est plus aussi méfiant qu'au tout début.

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